Votre publicité ici avec IMPACT_medias

Pour être bien dans son assiette

La performance d'un sportif passe aussi par l'estomac. Mais attention aux fausses ou aux vieilles croyances, nombreuses. Le nutritionniste Olivier Bourquin leur tord le cou.

12 nov. 2014, 00:01
data_art_8573002.jpg

La nutrition reste, chez le sportif, un pan aussi important que délaissé. Olivier Bourquin, auteur de "La performance sur mesure" (Editions Favre), l'a remarqué depuis longtemps. Chef de la préparation physique à Swiss Tennis durant plusieurs années, coach de Stéphane Bohli pendant quelques saisons, il s'est tourné vers le domaine de la nutrition. " Quand j'ai vu que les sportifs se nourrissaient mal, j'ai voulu comprendre: que leur offrir de plus? ", glisse-t-il. Aujourd'hui basé à Lausanne, Olivier Bourquin compte parmi ses clients le club de hockey du LHC , Yannick Ecoeur ou Maude Mathys (ski al pinisme). Leur concoctant un programme en adéquation avec leurs objectifs. Non sans humour, il s'est laissé cuisiner. A table.

De votre expérience et vos observations vous tirez un constat: les sportifs s'alimentent mal. Etonnant, non?

Il faut distinguer le sportif individuel de celui pratiquant un sport collectif. Dans les sports collectifs, plus de 90% ne savent pas s'alimenter; car ils misent sur la tactique, la technique et quand ça ne va pas, ils se ca chent derrière les autres. Le gars sur un marathon ou un court de tennis, quand ça se passe mal, ça se voit. Pour les sportifs d'endurance - triathlon, ski alpinisme, vélo -, les aliments sont leur carburant. L'intérêt porté à la nutrition est donc plus grand, mais énormément d'erreurs sont commises, et une grande partie des athlètes sont carencés en tout.

Pourtant, ce pan s'avère aussi important que l'entraînement...

Les athlètes qui réussissent (ndlr: il prend l'exemple de Djokovic ou Cristiano Ronaldo) cherchent le petit plus partout; dans tous les compartiments. Il faut être ouvert à la remise en question. On parle de performance, il ne faut pas se leurrer. Et celle-ci passe par le plaisir, voilà pourquoi les neurotransmetteurs, comme la dopamine, sont primordiaux. La plupart sont fabriqués par le fer, or nombre de sportifs montrent une carence en fer.

Quel est le risque?

Le risque, quand ça ne va pas, est de partir dans le surentraînement, puis de faire un burn-out et même basculer dans la dépression, ou l'anorexie. Il y a un gâchis énorme, alors que la base doit rester la santé.

Ça ouvre la porte aux raccourcis, non?

Effectivement. Quand ça ne va pas, l'athlète se tourne soit vers les médicaments, ou les produits dopants. Entre les deux, il peut et devrait y avoir une alimentation réfléchie. Par exemple, des problèmes d'inflammation peuvent être combattus sans recourir aux anti-inflammatoires.

Les sportifs fonctionnent énormément en termes de routine, de rituel. Un frein?

Au niveau de l'alimentation, les fausses ou vieilles croyances sont nombreuses chez le sportif. Les casser demande énormément de temps. En 2014, on entend toujours les mêmes bêtises; on est à l'âge de pierre. Je n'aime pas les dogmes, mais on sait davantage de choses aujourd'hui et je veux juste dire qu'on peut faire mieux.

Vous avez évoqué les fausses croyances, alors allons-y: le fameux plat de pâtes?

Il y a quand même autres chose que les pâtes! Quand les batteries sont rechargées, qu'on a suffisamment de glycogène musculaire, le système nerveux doit malgré tout pouvoir donner les bonnes commandes motrices. On a fait le plein, rempli le réservoir de la voiture, c'est bien. Mais après? Il faut tout de même se soucier du châssis, de l'huile, des freins, de l'électronique. Or, les acides aminés, les oméga 3, etc, on ne s'en occupe pas.

Quid du lait, pour le calcium?

On sait qu'énormément de gens ont des problèmes d'ostéoporose en raison d'une grande consommation de lait de vache. Si les gens supportent et aiment le lait, alors qu'ils continuent. Je ne suis pas pour interdire, j'observe simplement qu'un bon nombre de gens ont des problèmes intestinaux, ORL ou d'allergie à cause du lait.

Les cinq fruits et légumes par jour?

Là encore c'est un dogme, compliqué à appliquer au quotidien. C'est pour cela que certains compléments sont intéressants. La spiruline par exemple.

Le régime sans gluten, à la mode dans le milieu sportif?

Ces cinquante dernières années, le blé a été transformé et a perdu en qualité. Le système immunitaire des gens est de plus en plus fragile, mais seulement 1 à 2% de la population est intolérant au gluten. Après, on peut avoir des sensibilités. Pour les sportifs d'en durance, je conseille d'arrêter les produits contenant du gluten une semaine avant la course. De toute manière, vous digérerez mieux. Mais interdire, pourquoi? Je pré fère renforcer la flore intestinale.

Et après l'effort, le réconfort. Qu'en est-il de la si savoureuse bière de récup'?

Sans alcool, magnifique! Mais boire une bière (ndlr: avec alcool) déshydrate, car pour une bière, le corps puise dans trois décilitres d'eau pour éliminer l'alcool. Après l'effort, on ne cherche pourtant pas à se déshydrater, mais à se réhydrater.

Un grand travail d'éducation est à mener?

C'est de la démagogie, oui. Regardez actuellement la nourri ture servie autour des stades ou dans les milieux sportifs... Et sou vent le sport est un alibi pour aller boire et manger, il ne faut pas l'oublier. L'idée est la suivante: c'est un style de vie où tout part du cerveau. Nous devons donc bien le nourrir. Tout est une question de rythme. Si on mange la nuit, par exemple, on double de volume car le corps, au repos, n'est pas fait pour ça. En tenant compte des fonctionnements hormo naux et du sommeil, nous nous en sortirons mieux.

Votre publicité ici avec IMPACT_medias