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Affinage d'or au Tessin: dénonciation pénale à l'encontre d'Argor-Heraeus

Une entreprise basée au Tessin est soupçonnée de blanchiment en raison du raffinage d'or pillé de RDC en 2004 et 2005. Elle "refuse fermement ces accusations".

05 nov. 2013, 07:11
Un ouvrier de l'entreprise Argor-Heraeus en train de fondre un kilo d'or en barre.

 

Une dénonciation pénale contre l'entreprise suisse d'affinage Argor-Heraeus a été déposée auprès du Ministère public de la Confédération, a annoncé lundi l'ONG Trial. L'entreprise est soupçonnée de blanchiment en raison du raffinage d'or pillé de RDC en 2004 et 2005. Elle "refuse fermement ces accusations".

L'enquête menée par l'association suisse contre l'impunité Trial a permis de rassembler des preuves, a affirmé lors d'une conférence de presse à Genève l'avocat en charge de l'affaire Bénédict De Moerloose. Argor-Heraeus aurait raffiné entre 2004 et 2005 près de trois tonnes d'or pillé en République démocratique du Congo (RDC) par un groupe armé le Front nationaliste intégrationniste (FNI).

"Contrairement à ce que l'entreprise affirme, elle savait que l'or raffiné était d'origine criminelle", a déclaré l'avocat. Le directeur de Trial Philip Grant a affirmé qu'"il est intolérable que les matières premières pillées continuent d'alimenter les guerres en toute impunité".

Trial demande aux autorités suisses d'ouvrir une enquête, d'établir si une infraction a bel et bien été commise par la société et si, tel est le cas, de la sanctionner pour violation de l'article 305 bis du code pénal suisse. Basée à Mendrisio (TI), Argor-Heraeus est l'une des cinq plus grandes raffineries d'or de la planète.

Par l'intermédiaire de l'Ouganda

Accusé d'avoir commis des massacres, le FNI actif dès 2002 dans l'Ituri (nord-est de la RDC) a exploité la concession aurifère appelée "Concession 40" pour financer ses opérations et acheter des armes. Une part importante de cet or a été vendue en Ouganda à la société Uganda commecial impex (UCI), qui la revendait à la société Hussar, basée à Jersey (GB). Cette dernière avait chargé Argor-Heraeus de raffiner l'or entre juillet 2004 et juin 2005.

La société suisse a résilié son contrat avec l'entreprise Hussar le 3 juin 2005. En février 2006, le groupe d'experts mis sur pied par le Conseil de sécurité de l'ONU pour contrôler l'application de l'embargo sur les armes visant la RDC avait déjà accusé Argor-Heraeus d'être impliquée dans un trafic illégal d'or. L'entreprise tessinoise avait échappé au comité de sanctions de l'ONU, car la Suisse n'avait appliqué les sanctions visant la RDC que le 23 juin 2005.

Des preuves

Pour Kathi Lynn Austin, ancienne membre du groupe d'experts de l'ONU sur la RDC, actuellement responsable de l'ONG Conflict Awareness Project, "tout le monde sait que l'Ouganda ne produit pratiquement pas d'or et Argor ne pouvait donc ignorer que l'or venait de RDC".

Les preuves recueillies par l'ancienne experte de l'ONU et Trial reposent sur des documents comptables d'Hussar correspondant aux achats d'or entre mai 2003 et avril 2005, des permis d'importation et d'exportation de l'or indiquant son lieu d'origine (la RDC) et divers autres déclarations et documents.

Nouvelle campagne

"Nous enquêtons sur d'autres entreprises et notre travail ne s'arrête pas avec cette affaire", a affirmé Philip Grant. "Tant que l'impunité demeure, les pratiques illégales continuent, car les profits sont énormes", a-t-il expliqué. L'entreprise Metalor à Neuchâtel est aussi dans le collimateur, mais les preuves ne sont pas suffisantes.

"Il est temps que cela change", a ajouté le responsable de Trial, en annonçant le lancement d'une nouvelle campagne "Stop Pillage" avec le Conflict Awareness Project et l'Open Society Justice Initiative. Cette campagne vise à sensibiliser l'opinion publique à la question du pillage des matières premières, à ses liens avec les conflits armés et à la responsabilité de tous les acteurs de cette chaîne, y compris en Suisse.

Contactée, l'entreprise Argor-Heraeus déclare dans un communiqué diffusé en soirée "refuser fermement ces accusations pour des faits dont elle avait déjà été blanchie dans le cadre d'enquêtes approfondies menées par l'ONU, le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) et l'Autorité de surveillance des marchés financiers (FINMA).

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