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Le rachat de sociétés suisses par les Chinois ne ferait que commencer

18 avr. 2016, 10:41
La société ChemChina veut racheter le géant bâlois Syngenta.

"Les mouvements de capitaux sont désormais beaucoup plus libres", a indiqué à AWP Huang Yi, professeur en économie internationale et spécialiste de l'économie chinoise à l'Institut des hautes études internationales et du développement (IHEID) à Genève. Une libéralisation complète pourrait avoir lieu d'ici cinq ans, escompte-t-il.

Les caisses de pension de l'État chinois peuvent depuis peu investir en Bourse, souligne pour sa part Stephan Oehen, qui conseille des investisseurs chinois en Suisse. "Pas moins de 100 milliards de dollars pourraient se déverser sur le marché des capitaux ces prochaines années, ce qui alimentera indirectement les acquisitions".

Pour Christa Janjic-Marti, du cabinet de conseil Wellershoff & Partners, l'accumulation de ces derniers mois n'est pas un hasard. "Plusieurs indicateurs fiables mais en contradiction avec les statistiques officielles indiquent un fort ralentissement de l'économie chinoise au semestre précédent", souligne-t-elle. "Paniquées, les autorités ont ouvert tout grand les vannes des crédits, abreuvant les entreprises de capitaux qu'elles utilisent pour faire des achats."

S'approprier un savoir-faire entrepreneurial

Certaines acquisitions correspondent à des questions d'intérêt national, comme dans le cas de Syngenta, relève Felix Sutter, président de la Chambre de commerce Suisse-Chine et partenaire dans le cabinet de conseil PwC à Zurich. La sécurité alimentaire est en effet une préoccupation de Pékin et ChemChina un groupe public.

 

Mais d'un point de vue entrepreneurial, l'opération reste parfaitement sensée, d'autant plus que les deux sociétés travaillaient déjà ensemble depuis des années, a relevé M. Sutter.

"Racheter une entreprise permet de s'approprier son savoir-faire sans passer par un long processus de recherche et développement", explique le professeur Huang Yi. Un avis que partage Christa Janjic-Marti. "La Chine doit impérativement faire un grand pas dans la chaîne de création de valeur", souligne-t-elle. En dix ans, le salaire minimum a en effet bondi de 100 à 500 dollars.

"Structurellement, nous assistons à un saut qualitatif dans l'industrie en Chine", rappelle Felix Sutter. Outre le savoir-faire, les investisseurs chinois recherchent des entreprises qui disposent déjà d'un dense réseau de partenaires dans le monde entier, ce qui leur permet d'étendre leur activité. Ce processus permet d'ailleurs également aux entreprises rachetées d'étendre leurs activités, relève M. Sutter.

À ces facteurs s'ajoute un timing favorable. "Buy cheap, sell high", résume le professeur Huang Yi. Les entreprises européennes sont actuellement bon marché, faiblesse de l'euro oblige. Et le yuan pourrait aussi perdre de sa valeur. "Il est surévalué de 10 à 15% à l'heure actuelle", estime Stephan Oehen.

Technologies de l'environnement et immobilier privilégiés

Les technologies de l'environnement et l'immobilier intéressent tout particulièrement les investisseurs chinois, mais le secteur financier pourrait aussi les attirer à cette heure. "Je peux parfaitement m'imaginer qu'un investisseur chinois joue un rôle dans une grande banque, comme c'est déjà le cas aujourd'hui avec les fonds souverains de Singapour ou du Qatar" qui détiennent respectivement des participations dans UBS et Credit Suisse, commente Stephan Oehen.

Si la Suisse ne monopolise de loin pas les investissements chinois à l'étranger, elle constitue une destination privilégiée, confirme le professeur Huang Yi. Les investissements chinois n'y sont pas accueillis avec suspicion comme par exemple aux États-Unis. Les conditions-cadre y sont excellentes et le système financier solide et performant, ajoute-t-il.

La liste des acquisitions opérées par les groupes de l'Empire du Milieu s'allonge régulièrement. Lundi dernier, HNA, maison-mère de la compagnie aérienne Hainan Airlines, a fait une offre de 1,4 milliard de francs aux actionnaires de Gategroup. L'entreprise de restauration à bord des avions pourrait ainsi rejoindre le spécialiste de la manutention aéroportuaire Swissport, ancienne filiale de la défunte Swissair, également avalé par HNA en 2015.

 

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