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Les producteurs de lait ne veulent pas d'une ouverture du marché avec l'Europe

Répondant à l'expertise du Conseil fédéral sur une ouverture du marché laitier à l'Union européenne, les producteurs suisses ont présenté vendredi un contre-rapport. Alors que Berne estime les pertes à 100 ou 150 millions par an, les agriculteurs les estiment à 260 millions de francs.

18 juil. 2014, 14:46
Le Conseil fédéral et les producteurs suisses de lait sont d'accord sur un point: l'ouverture du marché va entraîner des pertes conséquentes.

Analyse en main, les producteurs suisses de lait reviennent à la charge contre le projet du gouvernement d'une ouverture sectorielle du marché laitier avec l'UE. Selon eux, le Conseil fédéral se trompe en prétendant que la production ne chutera pas, avec des conséquences sur l'auto-approvisionnement et les structures agricoles notamment.

Le rapport du Conseil fédéral présenté en mai, à la demande du Parlement, pour analyser le pour et le contre de l'ouverture de la "ligne blanche" repose sur une étude "plausible économiquement", mais "peu réaliste" concrètement. A l'appui de telles affirmations, la Fédération suisse des producteurs de lait PSL a rendu publique vendredi à Berne une sorte de contre-expertise.

Ce travail complémentaire à l'étude de la Haute école spécialisée (HES) bernoise des sciences agricoles de Zollikofen, présenté l'an dernier par la PSL en prévision de ce rapport gouvernemental, visait à comprendre pourquoi les deux analyses parviennent à des conclusions si divergentes.

"Sans ces bases supplémentaires, le Parlement aurait pour seule référence le rapport du Conseil fédéral, et se fourvoierait", a dit devant la presse à Berne le président de l'Union suisse des paysans (USP) et conseiller national Markus Ritter (PDC/SG).

Deux expertises divergentes

D'après l'expertise gouvernementale, une ouverture totale du marché du lait entre la Suisse et l'UE serait avantageuse pour l'économie helvétique. Certes, le prix du lait payé au producteur pourrait chuter de 17 à 25%, soit jusqu'à 16 centimes, sans qu'il soit certain que le consommateur en bénéficie.

Mais des mesures sont envisagées pour compenser les pertes de revenus estimées entre 100 et 150 millions de francs par an. En outre, les quantités produites devraient continuer d'augmenter légèrement et les changements structurels rester faibles.

L'étude mandatée par la PSL juge au contraire qu'une telle ouverture du marché serait difficilement supportable pour les producteurs suisses et pas davantage profitable aux commerçants et aux transformateurs. Et ce sont plutôt 260 millions de pertes qu'il s'agirait de compenser par des subventions.

Des exploitations, et non des moindres, se détourneraient de la production laitière et cette dernière chuterait, avec la perte d'importantes parts de marché. Cela mettrait en danger l'actuel auto-approvisionnement, à 100%, en produits laitiers frais.

Différences méthodologiques

L'analyse complémentaire présentée vendredi impute ces différences en grande partie à des raisons méthodologiques. L'étude du Conseil fédéral se base essentiellement sur les résultats de simulations, incluant des informations sur les quantités, les prix, ainsi que l'évolution des structures et des revenus agricoles. Celle de la HES est en revanche basée sur les données réelles de 16 exploitations et sur une enquête menée auprès d'experts.

"Face aux hypothèses irréalistes sur le comportement des exploitants qui ont été formulées (dans le rapport du Conseil fédéral), l'exploitant que je suis devient sceptique", a affirmé Markus Ritter. "Quant au politicien que je suis, il se dit qu'il n'est pas forcément le seul à se poser des questions sur la crédibilité des simulations" réalisées par les services de l'administration, a ajouté le conseiller national.

Poudre aux yeux

Selon le président de la PSL Hanspeter Kern, le Conseil fédéral envoie de la poudre aux yeux non seulement des producteurs de lait mais aussi des décideurs politiques. Or il est sûr que cette voie ne permettra ni de maintenir les parts de marché en Suisse, ni de les augmenter à l'étranger. Pour les producteurs de lait, la démarche envisagée n'est donc pas une option, a martelé leur président.

Pour l'instant toutefois, la question d'une ouverture de la "ligne blanche" est purement théorique, aucun pourparler exploratoire n'ayant eu lieu avec Bruxelles, assurait en mai le directeur de l'Office fédéral de l'agriculture Bernard Lehmann. Par "ligne blanche", on entend tous les produits laitiers sauf le fromage, lequel constitue la "ligne jaune", dont le marché avec l'UE est déjà ouvert depuis 2007.

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