Indispensable à la formation de l'embryon, un processus embryonnaire pourrait se réactiver accidentellement dans les cellules tumorales, selon des chercheurs de l'EPFL.
Certains gènes ne s'expriment qu'au tout début de la formation de l'embryon: ils ne sont actifs que pendant quatre jours environ, puis s'endorment à jamais, explique jeudi l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) dans un communiqué.
Cette inactivation est particulière, car la grande majorité des gènes restent actifs tout au long de la vie.
Des chercheurs de l'EPFL ont décrypté une partie de ce mécanisme. L'équipe de Didier Trono, chef du Laboratoire de virologie et génétique et coauteur de l'article, est parvenue à identifier un groupe de protéines qui jouent un rôle clé dans le phénomène.
Cette découverte fait l'objet d'une publication dans "Cell Reports".
ADN modifié
Les protéines en question s'accrochent à une séquence d'ADN proche du gène et y apposent une marque quasiment indélébile: un élément de l'ADN est substitué par un autre, phénomène connu sous le nom de "méthylation".
Après ce marquage, la machinerie cellulaire reconnaîtra le signe et maintiendra pour toujours le gène en dormance.
"C'est un mécanisme extrêmement élégant. Ces gènes sont sans doute utiles tout au début de la formation de l'embryon, et plutôt que de devoir les désactiver ensuite à chaque division cellulaire, le travail est fait une bonne fois pour toutes, dès le moment où ils ne sont plus requis", explique Didier Trono.
Réactivation accidentelle
Le même processus, déclenché plus tard et accidentellement, pourrait également être à l'origine de nombreux cancers. En effet, dans de nombreuses cellules cancéreuses, on constate que certains gènes normalement actifs sont devenus dormants.
"Le processus embryonnaire qui vise à réduire certains gènes au silence pourrait se réactiver de manière fortuite et participer à la formation de cellules tumorales", souligne le professeur Trono.
Ce serait par exemple le cas si le gène responsable du contrôle de la division était touché, ouvrant la porte à une multiplication anarchique des cellules.
Reste désormais à comprendre pourquoi, dans une situation normale, le processus cesse après les tous premiers jours de l'embryogenèse, alors même que nombre des protéines responsables continuent à être exprimés, explique Didier Trono.
"Si nous parvenons à saisir le fonctionnement de cette horloge, nous pourrons peut-être comprendre comment le mécanisme s'enclenche à nouveau plus tard", conclut-il.