Le drame a eu lieu en pleine prière du vendredi: la mosquée a été visée par un double attentat-suicide puis par une attaque d'hommes armés. Trois bombes ont explosé dans la cour et dans une rue adjacente.
Cette mosquée est dirigée par l'un des principaux dignitaires musulmans du pays, l'émir de Kano Mohammed Sanusi II. Ce dernier a récemment appelé les Nigérians à prendre les armes pour se défendre des attaques de Boko Haram, fustigeant l'incapacité de l'armée nigériane à défendre les civils.
80 millions de musulmans
Il est exceptionnel que des dignitaires religieux prennent publiquement position sur les questions politiques et militaires, mais de nombreux Nigérians s'attendaient à ce que Sanusi Lamido Sanusi - son nom à la ville - défie les conventions et s'implique dans le débat, depuis son accession à ce poste prestigieux.
L'émir de Kano est une personnalité très influente au Nigeria, qui compte plus de 80 millions de musulmans (dont la majorité vit dans le Nord), sur une population de 170 millions d'habitants.
Officiellement, son autorité vient juste après celle du sultan de Sokoto, considéré comme le chef des musulmans nigérians, qui a lui aussi lancé lundi des critiques cinglantes contre l'armée.
Avant d'être nommé émir en juin, M. Sanusi a occupé le poste de gouverneur de la Banque centrale nigériane. Il avait été démis de ses fonctions en février par le président Goodluck Jonathan, peu après avoir dénoncé le détournement de 20 milliards de dollars de fonds publics par la compagnie pétrolière nationale.
Plusieurs attaques sanglantes
Kano, la plus grande ville du nord du Nigeria avec 10 millions d'habitants, a souvent été le théâtre d'attaques de Boko Haram, dont la plus spectaculaire avait fait au moins 185 morts en janvier 2012. Le 14 novembre, un attentat-suicide a fait au moins six morts dont trois policiers à Kano.
L'ancien émir de Kano, Ado Abdullahi Bayero, avait survécu à des tentatives d'assassinat du groupe islamiste, tout comme le sultan de Sokoto et le shehu de Borno, un autre chef musulman important. Boko Haram reproche aux dignitaires musulmans nigérians de trahir la religion en se soumettant à l'autorité du gouvernement nigérian.
Le triple attentat de Kano intervient au moment où des milices locales ont réussi à déjouer une nouvelle attaque à Maiduguri, capitale de l'Etat de Borno (nord-est) et ancien fief de l'insurrection islamiste.