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Commerce mondial: un remake du scénario de Genève 2008 hante les esprits

Le spectre du scénario de Genève 2008 où l'opposition entre l'Inde et les Etats-Unis avait fait capoter un accord à l'OMC plane sur les négociations qui se tienne à Bali. Surtout avec le refus catégorique de l'Inde de transiger sur le dossier agricole.

05 déc. 2013, 10:34
La fermeté de l'Inde sur le dossier agricole fait planer jeudi sur Bali le spectre du scénario de juillet 2008 à Genève.

La fermeté de l'Inde sur le dossier agricole fait planer jeudi sur Bali le spectre du scénario de juillet 2008 à Genève. Lors de cette tentative de conclure le cycle de Doha, l'opposition entre l'Inde et les Etats-Unis avait déjà fait capoter un accord à l'OMC.

En juillet 2008 avait eu lieu la dernière tentative sérieuse, avant la conférence de Bali, de conclure un accord dans le cadre du cycle de Doha, lancé il y a 12 ans dans la capitale du Qatar. Pendant neuf jours, lors d'une mini-ministérielle sous la direction de l'ex-directeur général de l'OMC Pascal Lamy, les principales puissances commerciales étaient parvenues très proches d'un accord sur des textes détaillés.

L'ombre de Genève

L'édifice s'était écroulé à cause d'un différend entre l'Inde et les Etats-Unis sur une clause de sauvegarde protégeant les marchés des pays en développement d'une hausse de leurs importations agricoles. L'Inde avait demandé un seuil de déclenchement de 15% et les Etats-Unis n'avaient pas voulu descendre au-dessous d'une hausse de 40% des importations.

Ce différend de 2008 évoque irrésistiblement celui qui a surgi à Bali sur la clause de paix destinée à éviter au nouveau programme indien de soutien à son agriculture d'être en violation des obligations de New Delhi dans le cadre de l'accord sur l'agriculture du cycle de l'Uruguay (conclu à Marrakech en 1994). La clause de paix proposée dans le projet d'accord est d'une durée de quatre ans, mais l'Inde veut qu'elle ne soit pas limitée dans le temps en attendant un règlement définitif de la question des subventions agricoles (qui pourrait prendre de nombreuses années).

Au terme de la réunion de 2008 à Genève, la ministre américaine au commerce Susan Schwab avait déclaré sans ambages: "Tous les pays de l'OMC ont fait preuve de souplesse sauf un". Le ministre indien Kamal Nath avait aussitôt répliqué en dénonçant le refus des Etats-Unis d'accepter sa version de la clause de sauvegarde. Doris Leuthard dirigeait à l'époque la délégation suisse.

Accord plus limité

Après l'échec de juillet 2008, Pascal Lamy avait appelé à reprendre immédiatement les négociations. Mais la volonté n'y était plus, jusqu'à la conférence de décembre 2011 à Genève où les pays membres ont décidé de mettre entre parenthèses certains sujets du cycle de Doha (comme l'accès au marché des produits industriels, le NAMA, un dossier sur lequel pays du Nord et du Sud s'affrontaient tout aussi durement et qui avait abouti à l'échec de la conférence de Cancun en 2003) pour conclure un "Doha light", un accord plus limité.

Ce "Doha light" pourrait cependant capoter à Bali, toujours à cause de l'agriculture, laissant sur le bord du chemin tous les autres dossiers en discussion à l'OMC, comme l'aide aux pays les moins avancés, le coton, les barrières non-tarifaires, la coopération douanière, les services, les règles d'origine.

Paralysie de plusieurs années

Maints gouvernements redoutent qu'en cas d'échec à Bali, comme en 2008, la paralysie de l'OMC dure plusieurs années, vidant l'organisation de toute capacité de négocier des accords et d'adapter les règles du système multilatéral aux nouveaux enjeux. Un journal a titré: "Une OMC affaiblie signifierait la loi de la jungle", avec un enchevêtrement d'accords bilatéraux et régionaux entravant sérieusement la sécurité juridique nécessaire aux entreprises pour exporter et au détriment des pays les plus faibles.

Des diplomates estimaient toutefois jeudi que tout n'est encore pas perdu à Bali, si une "formule magique" est in extremis trouvée sur la durée de la clause de paix, en faisant preuve d'imagination sémantique pour concilier les points de vue de l'Inde et des grands pays exportateurs agricoles. Mais l'horloge tourne inexorablement et le ministre américain Michael Froman a indiqué qu'il doit partir vendredi soir.

Les Etats-Unis ont deux grands projets ambitieux alternatifs dans le domaine commercial: un accord de libre-échange transpacifique avec les pays asiatiques et un accord transatlantique avec l'Union européenne. La Suisse, pour sa part, continue patiemment de tisser un réseau très serré d'accords de libre-échange dans le cadre de l'Association européenne de libre-échange (AELE) ou directement, comme l'accord signé cette année par Berne avec la Chine, qui ouvre les marchés à ses exportateurs.

 

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