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Grèce: procès du journaliste dénonçant les détenteurs de comptes en Suisse

Un journaliste grec comparaissait jeudi devant la justice pour avoir publié une liste de détenteurs présumés de comptes en Suisse. Plusieurs gouvernements successifs sont accusés d'avoir ignorée cette liste alors que l'évasion fiscale reste un des maux non soignés du pays.

01 nov. 2012, 17:22
Le procès du journaliste grec Costas Vaxevanis qui avait publié une liste de personnes présumées détentrices de compte en suisse s'ouvre ce jeudi en Grèce.

Costas Vaxevanis, 46 ans, journaliste de télévision et d'investigation pour le magazine "Hot Doc", est poursuivi pour "violation de données personnelles" pour avoir publié samedi une liste comprenant 2.059 noms d'individus, tirée de données provenant de la banque HSBC en Suisse, selon lui. Il risque au maximum trois ans de prison.

Le président de la Fédération internationale des journalistes, Jim Boumelha, qui a témoigné en sa faveur, s'est dit "surpris" de l'arrestation. Il a qualifié le procès de "farce absurde".
 
Le président du syndicat des journalistes d'Athènes, Dimitris Trimis, a également témoigné devant la cour: "J'aurais fait la même chose, si j'étais à la place de Costas", a-t-il dit. "Un compte bancaire n'est pas une donnée personnelle. On vit dans une époque de transparence", a-t-il ajouté.
 
"Camouflet à la démocratie"
 
La députée de Gauche radicale Syriza et fille d'un des avocats de la défense, Zoé Constantopoulou, a estimé que les poursuites contre M. Vaxevanis sont "un camouflet à la démocratie".
 
Tout en reconnaissant que le simple fait de détenir un compte en Suisse n'est pas illégal, M. Vaxevanis invoque le droit de la presse à publier des documents cachés ou minimisés par les autorités pour dénoncer des scandales, dans un contexte où le nouveau gouvernement de coalition est confronté à la colère croissante de la rue face à une austérité accusée d'épargner les riches et les puissants.
 
Le journaliste a été brièvement arrêté et relâché dimanche par la police.
 
Liste Lagarde
 
Une polémique a éclaté ces derniers mois en Grèce sur une liste, transmise en 2010 au gouvernement grec par l'ancienne ministre française des Finances Christine Lagarde, aujourd'hui patronne du FMI, incluant des noms des détenteurs grecs de comptes sur la banque suisse HSBC et dont les autorités grecques n'ont rien fait depuis deux ans.
 
"Au lieu de lutter contre les crimes des fraudeurs du fisc, la justice s'occupe de moi alors que j'ai fait mon devoir, mon devoir de transparence", avait déclaré M. Vaxevanis dimanche. Il accuse l'Etat grec d'hypocrisie et affirme que le système judiciaire est soumis à un système politique corrompu.
 
La liste publiée par M. Vaxevanis, qu'il affirme être ce que la presse a surnommé la "liste de Lagarde" comprend des entrepreneurs, avocats, armateurs, médecins, commerçants, joailliers, anciens hommes politiques ou leurs proches, mais aussi des "femmes au foyer", des étudiants et de nombreuses "sociétés domiciliées".
 
Précédent français
 
En France, une affaire similaire a eu lieu en 2009 lorsque la justice française avait reçu des fichiers équivalents issus de documents subtilisés par un employé de HSBC, sur la base desquels des fraudeurs français ont subi un redressement fiscal, mais dans la plus grande discrétion.
 
A la suite d'une mini-crise entre Paris et Berne concernant cette liste, les fichiers initialement volés par un employé ont finalement été restitués à la Suisse. Mais auparavant la France les avait transmis, courant 2010, à d'autres pays, dont la Grèce.
 
M. Vaxevanis a affirmé l'avoir obtenue via une lettre anonyme dont l'expéditeur avait indiqué l'avoir reçue d'un homme politique.
 
Diligence troublante
 
La diligence affichée par la police dimanche lors de son arrestation, dans un pays où la lenteur de la justice est proverbiale, a troublé de nombreux commentateurs.
 
"Le gouvernement grec ne peut pas divorcer des principes européens qu'il s'est engagé à soutenir, et les journalistes doivent avoir le droit de faire leur métier sans peur de représailles", a déclaré Nina Ognianova, coordinatrice du Comité de Protection des Journalistes (CPJ) pour l'Europe et l'Asie centrale dans un communiqué.

Davantage dans cette vidéo de 2'09" sous-titrée en anglais.

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