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Le Nobel de littérature attribué au Chinois Mo Yan

Le Prix Nobel de littérature a été attribué jeudi au Chinois Mo Yan, a annoncé le comité Nobel à Stockholm.

11 oct. 2012, 13:07
Mo Yan rappelle par son réalisme d'écriture l'Américain William Faulkner ou au Colombien Gabriel Garcia Marquez.
Qu'il dépeigne une scène de sexe ou de supplice, les ravages d'une guerre ou d'une beuverie, Mo Yan le fait avec une truculence toute rabelaisienne. Son réalisme d'écriture et l'attachement à son terroir en Chine orientale lui valent d'être comparé à l'Américain William Faulkner ou au Colombien Gabriel Garcia Marquez.
 
Deux illustres prédécesseurs qu'il a rejoints jeudi sur la liste des lauréats du Nobel de littérature. "Il prend le même plaisir à décrire, en long en large et en travers, aussi bien un grand banquet qu'un grand massacre", relate Sylvie Gentil, l'une des premières traductrices de l'écrivain.
 
Mo Yan, visage piriforme et chevelure clairsemée poivre et sel, est aujourd'hui l'un des auteurs chinois les plus réputés, dans son pays et à l'étranger. Il a atteint la notoriété avec "Le clan du sorgho", porté à l'écran sous le titre "Le sorgho rouge" par le réalisateur Zhang Yimou.
 
Même si ses oeuvres sont fréquemment des "pavés" dépassant les 500 pages après traduction, elles figurent régulièrement parmi les best-sellers en Chine, à côté notamment des romans de Yu Hua, l'auteur de "Brothers".
 
Faim et privations
 
De son vrai nom Guan Moye, Mo Yan est né en 1955 au sein d'une famille rurale qui a connu la faim lors du Grand bond en avant (1958-1961). Cette campagne de collectivisation à outrance, initiée par Mao, a provoqué de 20 à 50 millions de morts.
 
Dans sa région natale du Shandong, il vit donc une jeunesse marquée par les privations, une scolarité perturbée et vite interrompue, en pleine Révolution culturelle.
 
"Enfant il était très taciturne, il parlait peu, il était très renfermé sur lui-même", rappelle Mme Gentil. Plus tard il choisira comme nom de plume "Mo Yan", qui signifie "ne pas dire". Et c'est paradoxalement l'embrigadement qui lui permettra de s'épanouir.
 
"Sauvé par l'armée"
 
"Il fait partie de ces paysans de familles illettrées qui ont été plus ou moins sauvés par l'armée, en y étant enrôlés et en réussissant à y faire carrière en devenant écrivain", poursuit la traductrice.
 
Le paysan-soldat-écrivain gardera longtemps l'uniforme, ce qui ne l'empêchera pas de publier, même s'il a dû parfois se frotter à la censure. Notamment lors des premières éditions de "Beaux seins, belles fesses", l'un de ses romans les plus populaires.
 
Lui-même gros lecteur, il apprécie les auteurs occidentaux, la littérature russe, japonaise et sud-américaine, explique Noël Dutrait, qui a traduit en français "Le pays de l'alcool", une autre oeuvre phare du répertoire picaresque de l'auteur.
 
"Mo Yan a une particularité: il s'efforce toujours de changer son style à chaque roman", souligne M. Dutrait. Une richesse que l'on retrouve dans la variété des thèmes qu'il choisit, du conflit sino-japonais aux tortures chinoises, en passant par l'abattage des porcs ou la corruption des cadres communistes.
 
"Il écrit ce qu'il pense"
 
"Un écrivain se doit d'exprimer des critiques et son indignation face au côté sombre de la société et à la laideur de la nature humaine", a un jour affirmé Mo Yan.
 
Pourtant, devenu vice-président de la très officielle Association des écrivains chinois, il a parfois été accusé d'avoir manqué de solidarité avec la dissidence, dans le seul pays qui emprisonne encore un Nobel de la paix, l'intellectuel Liu Xiaobo.
 
"Il y a des gens qui lui reprochent de ne pas se démarquer du pouvoir", confirme Noël Dutrait, "mais en tout cas il écrit et il dit ce qu'il pense".
 
Dans un récent ouvrage intitulé "Grenouilles", Mo Yan évoque de sa plume acerbe la politique de contrôle des naissances en Chine, un sujet sensible qui a toutefois cessé depuis quelques années d'être tabou.
 
Grand roman de la Chine
 
Selon Eric Abrahamsen, un expert américain en littérature chinoise, Mo Yan est un "grand auteur (...) qui rédige le Grand roman de la Chine", tout en étant "très malin quant à ce qui peut ou ne peut pas être écrit".
 
Régulièrement invité à l'étranger, même s'il ne parle que le chinois, Mo Yan, avare d'interviews, reste très attaché à son berceau natal de Gaomi. C'est là qu'il a un jour reçu l'un de ses plus fidèles admirateurs, le Japonais Kenzaburo Oe, prix Nobel de littérature 1994.
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