Héritage des pluies acides, les deux tiers des cours d'eau du nord-est américain sont aujourd'hui nettement alcalins. Cette modification du pH de l'eau pourrait avoir des conséquences majeures sur l'approvisionnement en eau potable des grands centres urbains ainsi que sur les écosystèmes aquatiques.
Une étude parue lundi dans la revue Environnemental Science and Technology a été la première à étudier l'évolution sur une période prolongée (25 à 60 ans) de l'alcalinité de 97 grands cours d'eau, de la Floride au New Hampshire. Avec une valeur de 7 le pH est neutre, à moins de sept un liquide est acide et à plus de 7, il est alcalin.
Une eau plus alcaline complique le traitement des eaux potables et usées, favorise la croissance des algues et peut accélérer la corrosion des canalisations, explique Sujay Kaushal, un géologue de l'Université du Maryland (est), un des principaux auteurs de cette recherche.
Risque de toxicité
"La plus grande inquiétude réside dans la possibilité que des niveaux élevés d'alcalinité ne provoquent une toxicité de l'ammoniac dans l'eau, ce qui peut être néfaste aux récoltes irriguées avec ces eaux ainsi qu'aux populations de poissons dans les fleuves et rivières", précise-t-il.
Selon ces scientifiques, les pluies acides qui se forment avec la pollution produite par la combustion du charbon et du pétrole précipitent la dissolution des roches carbonatées ainsi que des revêtements de surfaces naturellement riches en minéraux alcalins.
Un passé encore présent
L'acide dans les eaux ronge alors le calcaire et les autres roches carbonatées, dissolvant les particules alcalines qui se retrouvent dans les cours d'eau et rivières. C'est un peu comme si les fleuves et rivières étaient traités avec un médicament antiacide, ironise Sujay Kaushal.
"La découverte de la forte alcalinité des grandes rivières et fleuves de l'est des Etats-Unis parmi les plus importants du pays a été une surprise totale", a ajouté le géologue. "Cela montre que ces grands systèmes d'eau sont plus sensibles qu'on ne le pensait".
"Les décideurs et le public pensent que les pluies acides sont une affaire du passé mais ce n'est pas du tout le cas", commente-t-il.