Intitulée «Breivik rencontre Wilders», la pièce qui devait être jouée ce jeudi soir et dimanche au centre culturel «De Balie», réunit les deux hommes qui se croisent par hasard à l'aéroport d'Heathrow. Le député attend son avion après la présentation à la Chambre des Lords de son film anti-islam «Fitna» (»Discorde» en arabe).
Si la rencontre entre les deux hommes est fictive, le film est bien réel. Long de 17 minutes et diffusé en 2008, il juxtapose des images d'attaques terroristes et des citations tirées notamment du Coran qui appellent, selon Geert Wilders, au meurtre des non-musulmans. Dans la pièce, présentée jeudi à la presse, Anders Breivik assure à Geert Wilders: «je vous admire (...) je soutiens votre lutte».
Contre «l'invasion musulmane»
Hostile au multiculturalisme et à l'»invasion musulmane» en Europe, Anders Behring Breivik avait le 22 juillet 2011 fait feu sur un rassemblement de jeunes travaillistes sur l'île d'Utoeya, près d'Oslo, après avoir fait exploser une bombe près du siège du gouvernement norvégien, faisant 77 morts au total.
Dans un manifeste de 1500 pages diffusé sur internet le jour des attaques, le Norvégien avait fait référence à Geert Wilders. Le député, qui assure être en lutte contre ce qu'il appelle «l'islamisation» des Pays-Bas, s'était dit «révulsé».
Geert Wilders avait qualifié de «camouflet» pour le mouvement anti-islamiste le fait que Behring Breivik «se soit retranché derrière la lutte contre l'islamisation» pour justifier les attaques.
La pièce a été écrite par Theodor Holman, un ami proche du cinéaste Theo van Gogh, virulent critique de l'islam, assassiné le 2 novembre 2004 à Amsterdam au nom de l'islam radical.
Debout sur une scène sans décor, les deux acteurs, l'un en costume, l'autre en polo rouge et pantalon gris, tiennent leur texte à la main face aux gradins qui peuvent accueillir 140 spectateurs.
«C'est une lecture plus qu'une pièce de théâtre», explique le metteur en scène Titus Muizelaar : «le jeu des acteurs est très minimaliste».
A Breivik qui lui demande jusqu'où il est prêt à aller pour ses idées, Geert Wilders répond : «je ne vous comprends pas, bien que nous ayons les mêmes idées... j'en suis désolé».
Les frontières de la démocratie
«Wilders est clair, ses frontières sont celles de la démocratie», commente à l'AFP le metteur en scène : «il est prêt à aller très très loin mais uniquement sur la scène politique».
Assurant qu'il «ne prendrait jamais les armes», l'auteur de la pièce M. Holman assure toutefois se sentir plus proche d'Anders Breivik que de Geert Wilders, «trop à gauche» notamment sur les sujets socio-économiques, dans un entretien publié le 16 mars par le blog néerlandais «de dagelijkse Standaard».
Mais si l'auteur devait choisir entre les deux personnages, il opterait pour le député néerlandais. «Je crois en la démocratie», assure-t-il : «au final, la démocratie nous protège».
«Nous ne donnons pas une scène à l'extrémisme, nous ne faisons que poser des questions contemporaines importantes», assure de son côté Youri Albrecht, le directeur du centre culturel. «Il s'agit de deux loups solitaires qui ont des opinions différentes et qui repartent chacun de leur côté sans en changer».
Avec 24 sièges de députés sur 150 à la chambre basse du Parlement néerlandais, le Parti pour la Liberté de M. Wilders soutient le gouvernement du Premier ministre libéral Mark Rutte.