«Il faut que ça soit bon, beau et imaginatif.» Il n'est pas encore 8h, ce samedi aux alentours du château de Crans. Mais une armée de Potes au feu, du nom de cette confrérie bachique et gastronomique née en 1963, est déjà prête à se mettre aux fourneaux.

Sur le stand des Potes du pied du Jura, c'est le commandeur Jean-Marie Vallade qui donne le ton. Ses six acolytes et lui sont arrivés à 7h. Leur feu de bois - car c'est là l'unique source de chaleur autorisée pour cette compétition de cuisine en plein air - bouronne déjà. La grande question, c'est de savoir ce qu'ils vont bien pouvoir préparer avec les mets surprises qui les attendent. «Il y a toujours un truc tordu», glisse Claude-Alain Roulet.

Quinze ingrédients dévoilés au dernier moment

A 8h tapantes, les émissaires des neuf équipes qui participent à cette 51e édition du concours de la Confrérie des Potes au feu se réunissent dans la cour. C'est l'heure de découvrir le contenu des paniers concoctés par la commanderie de Crans, organisatrice de l'évènement cette année. «Ohhh, il y a une bête», sourit l'un des participants.

Cette bestiole, c'est une caille. Il y en a même deux. Mais ce n'est pas tout: les cuisiniers découvrent des écrevisses - vivantes! -, de la truite du Léman, des raisinets, des haricots borlotti, ou encore du fenouil. Au total, quinze ingrédients, qu'il faudra tous utiliser pour réaliser une entrée et un plat principal.

Il n'y a pas de piège particulier, mais il y a de la diversité.

Claude Lagrange commandeur de Crans

Rien de tordu, finalement, même si tout le monde a encore en tête la cervelle d'agneau que les Versoisiens avaient inscrite au menu, en 2019. «Il n'y a pas de piège particulier, mais il y a de la diversité, reconnaît Claude Lagrange, commandeur de Crans. On peut réaliser de belles assiettes!»

Les assiettes, justement, seront présentées entre 11h45 et 14h30 au jury, selon un ordre de passage défini par tirage au sort. Du côté du pied du Jura, dont les préparations devront être prêtes à 12h45, les idées fusent. «On pourrait couper des couronnes de poivrons et mettre les écrevisses à l'intérieur», suggère l'un des potes.

«Allez, on va faire un saut au marché», enchaîne Jean-Marie Vallade. Quelques instants plus tard, la joyeuse équipe est réunie devant le stand qui lui permettra d'étoffer sa liste d'ingrédients avant de se mettre à la tâche. Dans un peu plus de quatre heures, le jury passera à table.

1. A chacun son secret

Pas question de se lancer tête baissée dans l'aventure. Chez les Potes de Versoix, on commence d'abord par faire les plans des assiettes. «On regarde comment on va disposer les choses, pour ne pas que ce soit un gros plâtras, note le commandeur Christophe Sudan. On fait quand même de la gastronomie!»

A 8h50, Günter Ebner a finalisé le plat alors qu'Olivier Ryser peaufine encore l'entrée, un stylo à la main. On sait seulement qu'elle sera composée de poisson.

Pour le reste, c'est motus et bouche cousue! En cette heure matinale, les Versoisiens se refusent à dévoiler les secrets de leurs recettes. Il faudra donc repasser régulièrement sur leur stand pour découvrir leur damier de courgettes et de carottes rouges et leur délicate purée de borlotti.

D'un bout à l'autre de leur préparation, ils s'en seront scrupuleusement tenu à leur projet initial. Elémentaire, selon Cédric Miche: «Vous imaginez un architecte changer ses plans en cours de route?» De quoi décrocher la troisième place, derrière Lausanne et Sion!

2. Manger avec les yeux

Ravioles d'écrevisses et leur bisque, tartare de légumes et carpaccio de truite: voilà pour l'entrée des Potes de La Côte gourmande. Pour la suite, ils ont prévu une déclinaison de caille accompagnée de purée de borlotti, carottes glacées, pommes Pont-Neuf et fricassée de chanterelles.

«On reste amateurs et on fait ça pour le plaisir, souligne Jérôme Maillet. Notre point fort, c'est la cuisson. Moins la présentation!»

Et pourtant. Quelques heures plus tard, leur entrée arrachera un «ah, c'est joli!» à la chroniqueuse gastronomique Annick Jeanmairet, membre du jury.

3. Aux petits oignons

Autant dire que la commanderie de La Côte gourmande a fait dans la dentelle. Pour leur purée de borlotti, ses représentants ont commencé par cuire les haricots avec de la poitrine fumée. Puis ils les ont patiemment pelé un à un au couteau.

«La peau est quand même assez dure, c'est du boulot, souriait Jean-Robert Gros, dit Jeannot, à l'heure de l'apéro. Mais on a le temps, on est là pour ça!»

Impossible, ensuite, de songer à utiliser un mixeur ou tout autre ustensile électrique: chez les Potes, tout se fait à l'huile de coude!

4. Coup de feu

A 12h35, les Potes du pied du Jura sont divisés en deux équipes: la première se tient devant le feu, la seconde s'affaire à dresser les assiettes. Il reste dix minutes avant le coup d'envoi. «Vous êtes prêts? Ils ne vont pas tarder!», lance soudain Jean-Marie Vallade.

A 12h42, le tambour est là, prêt à les escorter jusqu'à la table du jury. Encore quelques brins d'aneth pour la décoration, puis on passe à l'ultime étape: le nappage de la truite avec la sauce. A l'heure pile, tout est finalisé, et les cuisiniers s'en vont tout sourire présenter leurs plats.

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