Manuel Pascual sait apprécier les crus d'ici, mais, depuis deux ans, le Tartegnin lui laisse un arrière-goût amer. A l'origine de ce malaise, on trouve la sculpture qui trône au milieu du giratoire d'entrée dans le centre d'affaires rollois A-One.
Le sculpteur d'origine espagnole, établi à Gland depuis de longues décennies, n'est pas un novice en matière de décoration de giratoire. On lui doit notamment la grenouille et l'échassier qui ornent le rond-point en face de l'Union mondiale pour la na(UICN) dans le bas de sa ville, ainsi que diverses autres sculptures faites d'outils de jardinage récupérés et soudés pour une nouvelle incarnation. Séduite par ses réalisations glandoises, la Municipalité de Tartegnin le mandate en octobre 2009 pour un projet d'ornement du rond-point qui permet l'accès au business parc rollois - et qui a été financé par les promoteurs de ce dernier - mais qui se situe sur le territoire du "Pays du bon vin". Manuel Pascual propose, parmi plusieurs versions, un T en acier oxydé avec de grosses grappes, semblable aux armoiries de la commune. Sa rémunération de créateur incluse, il estime le coût, avant de lancer un appel d'offres à ses fournisseurs et sous-traitants, à environ 25 000 francs.
Rompant avec ses habitudes de recyclage, l'artiste de Gland souhaite une réalisation au top, notamment au niveau des soudures qu'il souhaite invisibles et la qualité des matériaux. Le budget gonfle à 35 000 francs et la commune annonce renoncer à cette offre formelle et met fin à sa collaboration avec le créateur.
La photo de son projet recalé paraît dans la presse
Côté technique, l'aménagement du giratoire avance. Un bureau d'ingénieur rollois se voit confier le mandat de préparer le dossier de mise à l'enquête. Et, dans les documents fournis, que retrouve-t-on? Le dessin du T conçu par Manuel Pascual, avec des cotes au centimètre près. Le dossier mis à l'enquête comprend même un photomontage du tronçon de route de l'Etraz que s'empressent de publier les journaux régionaux.
C'est en découvrant cette illustration que le sang de Manuel Pascual bouillonne et que l'homme se fâche. A la Municipalité de Tartegnin, on a argué que ce fameux T était ce qu'elle avait demandé à l'artiste, "rien de plus que les armoiries communales" . Pas de quoi, selon les autorités locales, revendiquer des droits d'auteur là-dessus.
Deux ans ont passé et ce T a trouvé sa place, incarnant fièrement le terroir venant flirter avec les multinationales de l'A-One si international, comme si le Pays du bon vin se faisait sa place par mi les grands. DSZ