Deux détenus se sont évadés jeudi soir du pénitencier d'Orbe, dans le nord vaudois. Ils ont été aidés dans leur fuite par deux complices qui ont forcé l'enceinte de la prison et tiré plusieurs coups de feu avec des kalachnikovs. Les fugitifs courent toujours.
La situation est exceptionnelle, a déclaré la cheffe du Département de l'intérieur (DINT) Béatrice Métraux vendredi devant la presse à Lausanne. "Il s'agit d'une invasion plutôt qu'une évasion, orchestrée par une bande organisée lourdement armée qui a mis le personnel pénitentiaire et sécuritaire en danger. Ils ont fait usage d'armes de guerre, du jamais vu en Suisse".
Les évadés proviennent du canton du Jura pour le Suisse de 52 ans et de Neuchâtel pour le Bosniaque de 34 ans. Ce dernier est membre des Pink Panthers, des braqueurs de bijouteries.
Mauvaise communication
Son appartenance à une bande organisée n'avait pas été communiquée au Service pénitentiaire, a précisé la ministre. Condamné à 6 ans et 8 mois pour brigandage, il aurait pu bénéficier d'une remise de peine en janvier, mais n'en a pas fait la demande, a ajouté Denis Pieren, directeur des Etablissements de la Plaine de l'Orbe (EPO).
Quant au Suisse, il a été condamné de nombreuses fois et purgeait une peine de sept ans de réclusion . En 1992, il se trouvait déjà à Bochuz et avait profité de l'évasion du pirate de l'air Hussein Hariri pour se faire la belle.
Pour l'heure, les deux hommes et leurs complices courent toujours malgré un important dispositif de recherche. Leur véhicule de couleur grise n'a pas pu être repéré.
A travers champs
Concernant le modus operandi, les deux détenus se trouvaient avec d'autres sur le terrain de sport sous la surveillance du personnel. Vers 19h35, deux véhicules se sont rapidement approchés de l'enceinte du pénitencier à travers champs, après avoir forcé un portail pour entrer dans le domaine des EPO.
Avec une fourgonnette utilitaire volée dans le canton de Fribourg, les deux complices ont repoussé les nombreuses rangées de barbelés pour s'approcher du grillage. Ensuite, avec deux échelles, ils ont créé un passage par lequel les détenus ont franchi l'enceinte grillagée également munie de barbelés.
Tirs en rafale
Dès le début de l'opération, les assaillants ont tiré plusieurs rafales de kalachnikovs afin de maintenir le personnel à distance. Personne n'a été blessé. Des douilles ont été retrouvées sur les lieux.
Les quatre malfrats ont pris la fuite à bord du second véhicule. Ils ont brûlé le premier afin de ne laisser aucune trace. La fumée a empêché les caméras de vidéosurveillance de filmer correctement la voiture, a précisé M. Pieren.
Personnel choqué
Le personnel n'a commis aucune faute. Menacés, l'agent de sécurité et les deux agents de détention ont agi de manière adéquate en se protégeant. Néanmoins, ils sont choqués. L'un des agents de sécurité a dû être hospitalisé, a souligné la cheffe du DINT.
Des mesures de sécurité immédiates ont été prises aux EPO où aucune évasion ne s'était produite depuis 1995, a annoncé Denis Pieren. Le secteur sport ne sera plus utilisé jusqu'à ce que la sécurité soit améliorée.
Les dossiers des détenus qui appartiendraient à une organisation mafieuse ou criminelle susceptible d'organiser une évasion seront réanalysés, a-t-il ajouté. En mai, un membre du gang des Pink Panthers s'était déjà enfui de la prison du Bois-Mermet avec l'aide de complices.
Propositions
Il s'agit d'une criminalité nouvelle, d'une violence extrême, qui ne concerne pas que le canton de Vaud. La réflexion doit avoir lieu au niveau romand et alémanique, a relevé Mme Métraux.
Suite à l'audit de sécurité effectué dans les prisons vaudoises qui sont pour la plupart obsolètes, Béatrice Métraux fera des propositions au Conseil d'Etat à la rentrée. Elles concernent la vidéosurveillance, l'organisation du personnel et les infrastructures.