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"Mon arrivée, un soulagement"

Bernard Stamm, qui a rejoint les Sables d'Olonne mercredi soir, revient sur un tour du monde particulièrement agité.

08 févr. 2013, 00:01
07.02.2013. Les Sables d'Olonne. Vendée Globe 2012-2013. Bernard Stamm. Photo Audrey Piguet

Accueilli en héros aux Sables d'Olonne mercredi soir, Bernard Stamm reste décontracté, malgré l'enchaînement des multiples sollicitations du public, de ses partenaires et des médias. Après avoir fêté son retour jusqu'au petit matin de jeudi dans un bar de Port Olona, le Saint-Preyard revient sur son périple.

Quel a été votre sentiment au moment d'emprunter le mythique chenal des Sables d'Olonne devant des milliers de spectateurs venus vous accueillir?

C'était incroyable. Déjà, je ne m'attendais pas à être entouré par tous ces bateaux au large ( ndlr: les conditions météo se sont améliorées au dernier moment ). Dans le chenal, la sensation était énorme. Mon arrivée fut un soulagement, le meilleur moment de ma course, même si le choc face à ce retour à la "réalité" a été important.

Avez-vous l'impression d'avoir terminé le Vendée Globe?

Je sais que je n'ai pas fini la course, mais j'ai tout de même bouclé le tour du monde. Je suis très fier d'avoir mené "Cheminées Poujoulat" à bon port.

On a beaucoup parlé des différents problèmes rencontrés par votre bateau. Que s'est-il réellement passé?

Dès le deuxième jour, l'un de mes hydrogénérateurs s'est arraché. Son support était mal dimensionné. J'ai compris que la course allait être compliquée. Mon bateau a été conçu comme un jouet et non pour faire le tour du monde à 20 noeuds de moyenne. Il n'était pas mature, mais je ne pensais pas que ce serait à ce point-là. J'ai dû me résoudre à "mouiller" près de l'île d'Aukland, où je me suis amarré à un navire russe après avoir perdu mon ancre. C'est là qu'un membre de l'équipage est monté sur mon monocoque pour me fournir de l'aide, sans que je ne m'en rende compte. C'était improbable!

Regrettez-vous votre amarrage?

J'ai fait une bêtise, mais je devais sauver mon bateau. Il y a quatre ans, j'ai cassé en refusant de faire une telle manoeuvre. Le soutien des gens m'a conforté dans mon choix; à un moment donné, la navigation prend le dessus sur la course. Certaines règles devraient être adaptées, car j'ai utilisé le navire russe comme un corps-mort. Je m'en suis servi comme j'aurais pu utiliser un arbre.

En voulez-vous à votre équipe de techniciens?

Je ne ressens aucune rancoeur, tout le monde peut faire des erreurs et chacun a effectué un travail énorme. Mais le truc, c'est que je me suis retrouvé seul à réparer les dégâts; ça m'a pourri la course. La casse que l'on a connue lors de la dernière Transat Jacques Vabre ( ndlr: en 2011 ) nous a coûté cher et on n'a jamais pu rattraper le retard. On a raté certaines choses et un débriefing nous permettra de prévoir des corrections pour la suite.

Lors de ce "Vendée", les mésaventures n'ont pas manqué...

C'est clair. J'ai également dû faire face à des soucis de la colonne de winch qui ont rendu mon 60 pieds beaucoup plus compliqué à prendre en mains. Des détails comme le fait que les hublots ( ndlr: situés en dessus de sa couchette ) fuyaient m'ont empêché de me reposer dans les meilleures conditions. Après ma disqualification, j'ai décidé de continuer car j'avais un tour du monde à finir. J'avais également embarqué un robot pour une expérience scientifique, que j'ai pu mener à bien. J'ai parfois maudit mon bateau. Au cours du "Globe", on est toujours dans l'extrême. Soit c'est l'euphorie, soit c'est le désespoir complet.

Le fait de devoir réduire la communication avec la terre par manque d'énergie vous a-t-il posé problème?

Non, ça ne m'a pas embêté. Communiquer avec les autres, c'est bien, mais ça me rappelle que je suis tout seul. C'est un lien, mais pas une aide. De plus, j'avais parfois de la peine à entendre mes interlocuteurs, comme ma petite fille; c'était frustrant. Par contre, les gens à terre ont besoin de ça.

Avant votre ravitaillement par votre ami Unaï Basurko au Cap Horn, vous avez très peu dormi...

En effet, j'ai dû me reposer pendant 5-6 heures en 4 jours. Il fallait que je reste à la barre pour préserver mon litre de fuel afin de pouvoir utiliser mes instruments en cas de nécessité. Je n'étais plus très lucide et j'ai été victime d'hallucinations. En gros, je rêvais éveillé.

Dans quel état se trouve votre dent, que vous avez dû soigner durant l'épreuve?

Je n'ai plus de douleur, mais je vais tout de même devoir montrer ça à un spécialiste ( rires ). Concernant la vidéo, je ne m'attendais pas à un tel buzz. J'ai utilisé la caméra comme miroir et je me suis dit que je pouvais en profiter pour appuyer sur le bouton enregistreur.

Durant votre aventure, vous avez rencontré certains "ennemis"...

Oui, j'ai notamment vu des phoques, lors de mon "escale" dans le Pacifique. Ils n'ont pas dû beaucoup apprécier ma présence puisque l'un d'entre eux a essayé de me voler un sac de voile.

Seriez-vous prêt à reprendre la mer?

Pour l'instant, j'ai envie de passer du temps avec mes proches et boire quelques bières. Mais il est déjà prévu que je prenne le départ de la "Jacques Vabre", en novembre.

Vous aurez 53 ans lors du Vendée Globe 2016...

C'est sûr que je ne vais pas dans le bon sens. Le temps est assassin. Je ne peux pas encore dire si je serai au départ du prochain "Globe". C'est un projet lourd, on participe pour gagner. Mais pour le faire, il faut beaucoup de motivation, ce qui n'est pas le cas en ce moment.

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