Après les faillites de Lausanne-Sports il y a huit ans et de Servette en 2005, un troisième grand club romand sombre donc dans les oubliettes. Les événements se sont précipités en début d'après-midi. Le club annonçait tout d'abord son dépôt de bilan. Peu après, le juge Bastien Sandoz du Tribunal régional du Littoral et du Val-de-Travers communiquait la sentence: «Vu l'avis de surendettement (...) de Neuchâtel Xamax SA, la faillite de celle-ci a été prononcée.» L'annonce officielle de fin est actée au 26 janvier à 15h10.
L'ardoise du club - déjà privé de sa licence de jeu il y a une semaine par la ligue - a été estimée récemment à quelque 8 millions de francs. Les joueurs et le staff n'étaient plus payés depuis début octobre, en plus des arriérés dans le paiement des impôts et de la location du stade.
A peine la faillite communiquée, la justice genevoise annonçait la mise en détention provisoire de Bulat Chagaev (à Champ-Dollon) par le procureur Yves Bertossa, au terme d'une audition sur les circonstances de la débâcle. Le propriétaire tchétchène déchu du club «rouge et noir», âgé de 51 ans, est prévenu de gestion déloyale, un mois après une première inculpation pour faux dans les titres. Il doit être une nouvelle fois auditionné demain.
«Perdu beaucoup d'argent»
Dans un communiqué peu avant son incarcération, son avocat Me Jacques Barillon était encore monté au créneau: «M. Chagaev n'a jamais eu d'autre intention que celle de faire prospérer un club et une région qu'il aime», a-t-il écrit. «Son but n'a jamaisété d'en tirer un quelconque profit personnel.» Et de poursuivre: «Les faits sont têtus: mon client a perdu beaucoup d'argent, là ou d'autres, plus nombreux que la pensée unique le distille, en ont gagné, directement ou indirectement, dans des proportions significatives.»
Me Barillon a précisé par la suite que Bulat Chagaev contestait la nouvelle infraction dont il est accusé. L'avocat demandera sa mise en liberté provisoire et s'étonne du risque de fuite avancé par le Parquet, précisant que son client s'était toujours tenu à disposition de la justice.
Sur le plan sportif, ce dénouement signifie que le Championnat d'Axpo Super League démarrera avec neuf équipes le 4 février, et qu'il n'y aura aucun relégué direct au terme de la saison. A moins d'une entente avec le club de Serrières pour repartir en 1re ligue, Xamax pourra redémarrer au mieux en 2e ligue interrégionale la saison prochaine. Pour autant encore qu'il y ait une société repreneuse.
Joueurs libres
Les joueurs de Xamax sont désormais libres de tout engagement contractuel. Nombre d'entre eux sont déjà en contact avancés avec d'autres clubs ou sont partis. L'issue est très douloureuse en particulier pour les jeunes du cru et le staff technique et administratif.
Deux fois champion de Suisse (1987 et 1988), deux fois quart de finaliste de la Coupe UEFA (1982 et 1986), le club «rouge et noir» a fait rêver des générations de fans. L'accumulation de problèmes et les nombreuses charrettes d'employés et de joueurs depuis son rachat il y a huit mois ont précipité sa chute.
Xamax pourra-t-il rebondir comme le LS et Servette l'ont fait? Les deux grands clubs lémaniques ont retrouvé aujourd'hui l'élite, moins de dix ans après avoir sombré. Le président de la Ligue Heinrich Schifferle a exprimé récemment sa conviction que Xamax lui aussi renaîtra de ses cendres. En attendant, le coup est rude aussi pour les promoteurs de la Maladière, stade neuf de 12'000 places qui va sonner creux.
Entre son rachat en mai dernier à Sylvio Bernasconi pour une somme estimée à 1,2 million de francs et sa faillite, le Xamax de M. Chagaev aura tenu moins de neuf mois, malgré des résultats sportifs satisfaisants.
Dans une de ses contre-attaques, Bulat Chagaev avait déposé plainte, le 20 janvier, contre l'ancien propriétaire du club Sylvio Bernasconi ainsi que contre trois autres ex-dirigeants pour notamment gestion déloyale et abus de confiance.