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Don d’organes: le taux de refus des proches est élevé en Suisse

Dans 60% des cas, les proches des personnes décédées refusent le don d’organes. Actuellement le prélèvement des organes ne peut se faire que si la personne décédée y a consenti de son vivant. Une initiative veut inverser ce système.

24 oct. 2020, 10:26
En suisse, une initiative populaire veut introduire le consentement présumé pour les donneurs d'organes. (illustration)

Un don d’organes ne peut pas avoir lieu sans que les proches ne soient consultés. Une telle décision peut être cependant très difficile pour eux si le défunt n’a pas exprimé le souhait d’un éventuel don de ses organes et dans 60% des cas, selon un sondage de Swisstransplant, ils refusent. L’initiative sur le don d’organes veut ainsi soutenir les proches dans cette décision.

Un don d’organes est pris en considération lorsque le patient présente des lésions irréversibles incompatibles avec la vie. «Quand le nom du patient n’est pas dans le registre de donneurs d’organes, on approche la famille pour connaître la volonté présumée du défunt», explique Marco Rusca, médecin adjoint en médecine intensive adulte au CHUV, interrogé par Keystone-ATS.

La question du don d’organes est vécue plus sereinement par les proches quand la volonté du patient est clairement connue.
Marco Rusca, médecin adjoint au CHUV

«Dans ces situations, on doit absolument en informer l’entourage le plus proche», précise le médecin. «S’il n’y a pas de proches ou de volonté exprimée par le patient, il n’y a pas de don», a-t-il affirmé.

Décider du don ou non des organes peut constituer un sérieux poids envers la famille. Selon la fondation Swisstransplant, qui gère le don d’organes au niveau national, il est très difficile pour les proches de prendre une décision qui va dans le sens de la personne décédée, ce qui expliquerait le taux de refus élevé (60%).

Les situations peuvent cependant varier. «La question du don d’organes est vécue plus sereinement par les proches quand la volonté du patient est clairement connue ou alors quand le patient est inscrit au registre national comme donneur ou non-donneur», explique Marco Rusca. Il arrive cependant que dans certains cas rares, le défunt n’ait pas de proches. «Dans un cas pareil, la question n’est même pas abordée, il n’y a aucun prélèvement d’organes», précise le médecin.

Inverser la charge

Si actuellement le prélèvement des organes ne peut se faire que si la personne décédée y a consenti de son vivant, l’initiative populaire «Pour sauver des vies en favorisant le don d’organes» veut inverser ce système en implantant le modèle de l’opposition: la personne doit s’y être explicitement opposée de son vivant pour que ses organes ne soient pas prélevés. C’est le principe du consentement présumé.

Le Conseil fédéral, même s’il est d’accord sur le fond avec les initiants, a proposé un contre-projet: le consentement présumé serait maintenu, mais en incluant les proches dans le processus de décision. Ils pourront s’opposer à un prélèvement si cela respecte la volonté présumée du défunt.

 

 

«Les infirmiers poseraient la question aux proches autrement, à savoir si la personne n’était pas d’accord au prélèvement de ses organes», explique le président du comité de l’initiative, Julien Cattin, interrogé par Keystone-ATS. «Cela réduirait considérablement la charge des familles parce qu’ils connaîtront la volonté du défunt et n’auront plus de doutes», note-t-il.

La fondation Swisstransplant soutient cette initiative «d’un point de vue idéologique». «Même si le taux de refus est élevé, 80% des Suisses sont en faveur du consentement présumé» indique le Dr Franz Immer, directeur de Swisstransplant. «Ce qui est cependant important pour nous, c’est d’intégrer aussi les proches dans cette initiative et nous allons plutôt dans le sens du contre-projet du Conseil Fédéral», précise-t-il.

Un droit à l’autodétermination

La commission de bioéthique de la Conférence des évêques suisses (CBCES) considère que l’initiative et le contre-projet seraient inefficaces. Elle propose un 3e modèle, celui de la déclaration, dans lequel les gens seraient obligés d’exprimer régulièrement leur volonté sur le sujet. Selon elle, il tiendrait mieux compte du droit à l’autodétermination.

«Il y a un flou qui entoure l’avis du patient et de la famille dans cette initiative», constate le Pr Stève Bobillier, collaborateur scientifique à la CBCES. «Le contre-projet prend en compte l’avis de la famille et c’est bien. Mais du moment qu’elle doit se prononcer, le consentement présumé au sens large ne changerait rien à la situation actuelle», explique-t-il.

Le contre-projet devait être transmis au Parlement pendant la session d’automne 2020. La pandémie de coronavirus a cependant retardé le processus et le projet se trouve en attente actuellement.

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