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La Suisse sous pression à cause du Luxembourg?

La fin du secret bancaire au Luxembourg met une pression supplémentaire sur la Suisse estime Philippe Kenel. Pour d'autres analystes

10 avr. 2013, 18:12
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Le Luxembourg a confirmé mercredi qu'il est prêt à assouplir le secret bancaire et à accepter l'échange automatique d'informations sur les paiements d'intérêts à partir du 1er janvier 2015. En Suisse, les avis divergent quant aux conséquences de ce revirement pour la place financière suisse.

"Nous pouvons sans danger introduire l'échange automatique à partir du 1er janvier 2015, a déclaré le premier ministre du Luxembourg Jean-Claude Juncker devant le parlement. Il a ajouté que la place financière du Grand-Duché était "prête à le faire".
 
En Suisse, les avis divergent quant aux conséquences. Pour l'avocat fiscaliste Philippe Kenel, la décision du Luxembourg met une "énorme pression" sur la place financière helvétique. "C'est l'échec de la stratégie du monde bancaire suisse" estime-t-il.
 
Pour Jürg Birri, expert auprès du cabinet d'audit KPMG, le revirement du Grand-Duché aura au contraire des conséquences limitées. L'échange d'informations porte en effet seulement sur les paiements d'intérêts et, selon lui, de nombreux établissements financiers ont déjà adapté leurs produits.
 
A Berne, le Secrétariat d'Etat aux questions financières internationales (SFI) s'en tient à la ligne poursuivie jusqu'ici. "La Suisse approuve par principe toutes les mesures qui visent à combattre l'évasion fiscale et à assurer une imposition efficace", indique une porte-parole du SFI.
 
Pas de position unifiée
 
C'est-à-dire une stratégie de l'argent propre basée sur l'impôt libératoire, l'assistance administrative et un renforcement des devoirs de diligence des intermédiaires financiers, selon le SFI. Il souligne que pour l'heure, tous les membres de l'Union Européenne (UE) concernés n'ont pas adopté de position unifiée.
 
Le SFI rappelle que depuis longtemps, la Suisse est prête à discuter d'une extension de l'accord sur la fiscalité de l'épargne avec l'UE afin de remédier aux lacunes existantes. Même son de cloche du côté de l'Association suisse des banquiers (ASB), qui se déclare ouverte à de telles discussions.
 
Insistant que l'échange automatique de renseignements avec l'UE ne constitue pas une option, l'ASB souligne que la Suisse est un état tiers et que l'on ne peut exiger d'elle que des mesures équivalentes. Par ailleurs, il n'existe actuellement pas de mandat de négociation émanant de l'UE.
 
Mercredi pourtant, la Commission européenne a signalé de son côté qu'un mandat pour négocier dans ce sens avec Berne pourrait bientôt se concrétiser. Jusqu'ici, le Luxembourg et l'Autriche y avaient fait obstacle, au nom de leur propre secret bancaire.
 
Cédé à Washington
 
Au-delà de l'UE, la loi fiscale américaine FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act) a encore considérablement modifié la donne. Jean-Claude Juncker a souligné pour sa part que c'est "surtout en raison de la position radicale des Etats-Unis" que son pays allait "céder".
 
La loi FATCA impose aux établissements financiers étrangers de transmettre au fisc américain (IRS) des informations sur les comptes détenus par des contribuables américains (citoyens des Etats-Unis ou non). Un accord fiscal est actuellement en négociation dans ce cadre entre le Luxembourg et Washington.
 
La Suisse a signé quant à elle en février son accord FATCA avec les Etats-Unis, qui garantit que les comptes détenus par des contribuables américains auprès de banques suisses seront déclarés au fisc américain. Le Parlement, voire le peuple, aura le dernier mot sur l'accord, qui devrait s'appliquer dès 2014.
 
Modèle sur mesure
 
Tel que négocié, le modèle tient compte des "particularités suisses". Il ne prévoit en effet aucun échange direct d'informations entre autorités helvétiques et américaines, ce qui le "distingue ainsi des autres modèles applicables dans de nombreux pays de l'UE", selon l'ASB.
 
Mercredi, le Luxembourg a rappelé pour sa part que les Américains veulent seulement travailler avec les pays qui acceptent l'échange automatique d'informations. "Nous ne pouvons pas refuser aux Européens ce que nous acceptons avec les Américains", a ajouté Jean-Claude Juncker.
 
Quant à l'Autriche, elle a annoncé mardi qu'elle allait négocier la levée du secret bancaire pour les résidents étrangers détenteurs d'un compte sur son sol, comme le lui demande l'UE. "Nous allons mener les discussions en commun avec le Luxembourg", a fait savoir le chancelier social-démocrate Werner Faymann.
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