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Les médias ont besoin d'aide pour franchir le cap du numérique

Les médias suisses ne pourront pas faire face aux bouleversements de l'ère numérique sans aide.

05 sept. 2014, 19:00
Des journaux et quotidiens de la presse ecrite de suisse romande, photographie ce mardi 22 mars 2011 a Lausanne. L'institut recherches et etudes des medias publicitaires, REMP, a sorti une nouvelle enquete sur le lectorat des journaux et quotidiens en suisse.  (KEYSTONE/Dominic Favre)

La Commission fédérale des médias (COFEM) souhaite une aide "substantielle" pour accompagner le virage du numérique et propose de créer une fondation ad hoc, indépendante de l'Etat.

Le profond changement qui secoue la branche, radio et TV comprises, est non seulement dû à la numérisation et la forte présence de grands groupes internationaux, mais aussi aux nouvelles habitudes des consommateurs. Les quotidiens régionaux et suprarégionaux sont les grands perdants, constate la commission d'experts mandatée par le Conseil fédéral, dans son rapport publié vendredi.

Ce secteur, qui contribue pourtant grandement au débat social et politique, subit pertes de lecteurs et de publicité. Et à ce jour, aucun éditeur n'a trouvé de modèle d'affaires viable pour l'offre en ligne, a résumé Hans-Peter Rohner, membre de la COFEM et président du conseil d'administration de PubliGroupe.

Aide obsolète

Pour garantir une offre d'informations large et variée dans toutes les régions linguistiques du pays, l'aide actuelle à la presse ne suffit plus. La COFEM prône donc l'abandon progressif des rabais sur les tarifs postaux pour la distribution des journaux (50 millions) au profit d'aides non liées au support papier. Elle demande aussi que la réduction de la TVA (73 millions actuellement) ne profite pas seulement aux médias traditionnels, mais aussi à l'offre online.

Les nouvelles mesures doivent profiter aux médias d'information qui contribuent au débat public, essentiel à la démocratie, et favoriser la qualité et l'innovation, selon la commission.

Coup de pouce à court terme

A court terme, la COFEM propose au Conseil fédéral d'octroyer une aide financière à l'Agence télégraphique suisse (ats). But de l'opération: permettre à l'agence de presse nationale de proposer une offre variée dans les trois langues nationales, à un meilleur prix pour ses clients.

La Confédération devrait continuer de soutenir la formation et la formation continue des journalistes et pourrait également créer un programme spécial de la Commission pour la technologie et l'innovation (CTI), dédié à des projets de développement et d'innovation tant journalistiques que commerciaux et techniques.

Fondation ès médias

A plus long terme, la commission plaide pour la création d'une fondation, à l'image de Pro Helvetia, indépendante de l'Etat, qui aurait la tâche d'attribuer des soutiens financiers. C'est encore la meilleure forme pour garantir une sécurité institutionnelle, estime la commission, même si elle n'est pas dupe que la fondation pourrait devenir le jouet de la politique.

A ce stade, "ce n'est qu'une idée qu'il faut encore creuser", a expliqué le président de la commission Otfried Jarren. Ce sera à la politique de décider: pour mettre en place cette institution, il faudrait des bases légales, voire un article constitutionnel.

Innover

La commission propose d'aider au financement de départ de jeunes pousses (start-up) actives dans le domaine des médias et avec des projets innovants, par exemple plates-formes en ligne ou Big Data. Ou de soutenir des produits journalistiques particulièrement novateurs visant une utilisation multimédia et interactive.

Enfin, la COFEM recommande un appui à des fonds de recherche indépendants ou rattachés à une rédaction, un financement d'un monitoring de la branche et à la recherche appliquée.

Des moyens substantiels

Questionnés sur les moyens financiers nécessaires, les membres de la commission n'ont pas avancé de chiffres. "Nous n'en avons pas discuté. C'est une question politique", a répondu Philip Kübler, cadre chez Swisscom. La commission espère tout de même des aides "substantielles" et de citer ce que l'Etat fait en matière de radio/télévision, de promotion de la culture ou du cinéma.

Pour le financement, la commission songe aux contributions actuelles de la Confédération, voire à une taxe sur la publicité, une taxe sur les transactions en ligne ou des subventions fédérales supplémentaires, sans exclure dons et contributions privés. Elle imagine même que la fondation pourrait recevoir une part de la redevance radio/TV.

Pas touche aux rabais postaux

A peine le rapport publié, l'association des médias romands Médias suisses et son homologue alémanique ont protesté contre l'abandon des rabais des tarifs postaux pour les journaux. Renchérir la distribution représenterait une menace de mort pour de nombreux journaux, justement dans cette phase de passage du papier au numérique.

Elles saluent par contre que l'aide aux médias reste indirecte, tout en se montrant quelque peu sceptiques sur l'idée d'une fondation, l'exemple de Pro Helvetia ayant justement montré qu'elle peut être victime de rétorsions politiques. Les propositions concernant l'ats, la TVA, l'innovation et la formation rencontrent l'assentiment.

L'association des journalistes impressum salue également les propositions. Comme la crise des médias s'accélère, elle attend désormais des décisions politiques rapides.

Le syndicat Syndicom et le PS regrettent que la commission n'ait pas eu le courage d'être plus offensive, en particulier dans des mesures favorisant la qualité et la diversité. Ils saluent en revanche l'idée d'une fondation, même si le rapport est un peu parcimonieux quant à sa concrétisation.

A l'inverse, l'Action pour la liberté de la presse estime que "ce n'est certainement pas la tâche de l'Etat que d'accompagner le processus de transformation dans le secteur médiatique". En outre, selon elle, "il est absurde de renforcer le soutien aux médias sans évoquer les redevances SSR".

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