Votre publicité ici avec IMPACT_medias
15

S'entraîner sur une autoroute vide

La brigade autoroutière a été créée en 1963, Jean-Paul Gruaz en était.

28 mai 2014, 00:01
data_art_8097078.jpg

fmorand@lacote.ch

Il y a cinquante et un ans naissait la première brigade autoroutière de Suisse. C'était le 27 mai 1963, soit près d'une année avant l'ouverture officielle de l'A1 reliant Genève à Lausanne. Le Fezzolan Jean-Paul Gruaz, aujourd'hui à la retraite, était l'un des gendarmes dans cette équipe nouvellement constituée. "Au début, nous y allions un peu à tâtons, se rappelle-t-il. Le chef de la brigade, l'adjudant Bornoz, s'était renseigné auprès de confrères et même rendu à l'étranger pour observer la manière de procéder, vu que c'était une première en Suisse" Comme l'autoroute s'ouvrait par petits tronçons, les policiers profitaient de l'absence de voitures pour s'entraîner et acquérir les bons réflexes, notamment lors de l'installation d'un bidirectionnel en cas d'accident. Le service d'entretien, qui aujourd'hui s'occupe de ce genre de tâche, n'était pas encore fonctionnel. "Je me souviens de notre chef, posté sur un pont, les jumelles et le chronomètre en main, disant à la radio: "C'est trop long, on recommence"!" , sourit Jean-Paul Gruaz.

 

Un poste en bois

 

Au départ, c'est dans des baraquements à Rolle que prennent place le sergent et ses huit sous-officiers et gendarmes. Le 20 octobre 1965, la section rejoint le centre de Bursins avec un effectif de cinq groupes de 4 hommes. Aujourd'hui, cinq unités de 11 personnes fonctionnant sur un tournus de 3 fois 8 heures sont stationnées à côté de l'aire de ravitaillement de La Côte. Pour la tranche 16-24h, un service supplémentaire est prévu. Cette équipe s'occupe des vols dans les grandes surfaces, nombreuses dans le secteur concerné. Car si, à leurs débuts, les agents basés à Bursins s'occupaient uniquement de l'autoroute, depuis 1999 les hommes qui s'y trouvent font partie de police secours. "Notre territoire va des frontières genevoises à la Venoge, la Cure et la Vallée de Joux" , explique l'adjudant Olivier Coderey, responsable du centre de Bursins. Malgré les différentes réorganisations de la police vaudoise, qui s'adapte à l'évolution du trafic et de la population, ce lieu stratégique n'a jamais été orphelin de gendarmes. Et ce même durant la totale reconstruction en 1997 d'un nouveau bâtiment. "Avant, nous pouvions voir l'autoroute depuis nos bureaux", constate Jean-Paul Gruaz. Les deux cellules initiales sont désormais au nombre de quatre. Et depuis octobre 2013, des personnes y sont détenues pour parfois plus de 48h, à l'image de ce qui se passe dans les autres centres, cela en raison de la surpopulation carcérale que connaît actuellement le canton. De plus, deux autres cellules sont utilisées en cas d'ivresse ou d'interpellation d'un automobiliste.

 

Fuir par l'autoroute

 

En cinquante ans, l'organisation et la structure évoluent; le travail aussi. "Au début, c'était davantage de l'éducation que de la prévention que nous effectuions avec les usagers de l'autoroute" , raconte Jean-Paul Gruaz. Il se souvient aussi des "cartons" du dimanche soir où la densité de la circulation engendrait souvent des accidents. Pour tenter d'éviter des comportements dangereux, la première brigade de l'autoroute se mettait à chaque jonction et "tournait" afin d'être visible. La peur du gendarme faisait son effet. "Aujourd'hui, nous sommes quotidiennement confrontés aux bouchons, mais nous constatons malgré tout moins d'accidents, les gens sont plus attentifs" , relève Olivier Coderey. Toutefois, certains comportements des usagers ne semblent pas évoluer. "Les déboîtements et les distances! Je trouve qu'encore maintenant les gens roulent très près les uns des autres", constate Jean-Paul Gruaz.

Au fil des kilomètres de bitume, des souvenirs viennent s'enregistrer dans la mémoire des deux hommes. Tels des contresens, heureusement certains pas fatals, l'installation d'une glissière de sécurité sur la berme centrale qui a évité que des véhicules effectuent un demi-tour ou dévient sur les pistes opposées ou le port obligatoire de la ceinture de sécurité "qui a réellement sauvé des vies" . Et dans les situations cocasses: les rares automobilistes qui s'arrêtaient sur la bande d'arrêt d'urgence pour pique-niquer.

Aujourd'hui, cette langue de goudron sert principalement à se déplacer d'un point à un autre. "Les fuites sont quasi toujours par l'autoroute, qui est le théâtre de poursuites. L'avantage, c'est que maintenant, nous avons le droit de continuer même sur France" , précise Olivier Coderey. "Je me souviens d'une course-poursuite à la suite d'un cambriolage à Rolle. Nous avions terminé la chasse sur un pont à Genève et avons fait changer la roue crevée à l'un des deux prévenus, afin de ramener le véhicule à Bursins. A chaque mouvement de cric, le chien policier grognait, faisant sursauter le cambrioleur" , raconte en riant Jean-Paul Gruaz.

Votre publicité ici avec IMPACT_medias