Les frères Alain et Eric Bocquet égratignent la Suisse. Si ces deux élus communistes français saluent dans un livre les progrès de la Confédération contre l’évasion fiscale, ils concentrent leurs critiques sur de nouvelles méthodes. Ils pointent du doigt les fondations et les ports francs.
Ce livre « est une arme efficace dans la lutte contre l’ordre cannibale du monde », écrit Jean Ziegler dans la préface de "Sans domicile fisc", à paraître aux éditions du Cherche Midi. Ses auteurs sont le député Alain Bocquet et le sénateur Eric Bocquet. Ils livrent dans cet ouvrage le résultat de plusieurs missions d’enquêtes et d’une centaine d’entretiens.
Les auteurs, tous deux communistes du Nord, plaident pour une gouvernance mondiale de la fiscalité, sous l’égide de l’ONU. Ils demandent la tenue d’une conférence mondiale, sur le modèle de la COP consacrée au climat, pour faire face à "la finance souterraine qui détruit nos sociétés".
Leur enquête évoque l’attitude de plusieurs pays. Parmi eux, la Suisse, où ils se sont rendus dans le cadre de leur enquête. "Je me souviens d’une soirée avec des élus suisses. Ils nous ont dit qu’ils n’avaient pas besoin de faire partie de l’UE, car ils en ont les avantages sans les inconvénients", se souvient Alain Boquet.
Clef suisse
"La Suisse reste une clé dans l’équilibre du mikado financier planétaire", assurent-ils. Même si "l’argent non déclaré y brûle désormais les doigts". Ils soulignent les progrès réalisés par la Suisse. "Les Helvètes se sont engagés à renoncer au secret bancaire en 2017", notent-ils, tout en rappellent que ces efforts sont liés à la pression initiale des Etats-Unis.
Selon eux, les méthodes anciennes sont terminées. "Ce vieil argent français présent en Suisse a alimenté toutes les images, tous fantasmes de l’évasion fiscale", explique Eric Bocquet. Aujourd’hui, l’évasion fiscale n’est donc plus celle "de la valise en carton remplie de billets".
A leurs yeux, ce sont d’autres méthodes qui permettent l’évasion fiscale. "L’économie de la Suisse, c’est la valorisation de l’argent. Elle va faire attention aux nouvelles règles, mais d’autres systèmes prendront le relai", assure Alain Bocquet.
En Suisse, "l’attrait des fondations, le succès des ports francs, espace douaniers d’exception, ne se démentent pas", soulignent-ils. Ils estiment à 13'000 le nombre de fondations installées dans la Confédération.
Selon les auteurs de "Sans domicile fisc", "elles sont de commodes paravents masquant des objectifs peu philanthropiques". Quant aux ports francs, « ils permettent le dépôt d’œuvre d’art, de bijoux, de valeurs venus de l’étranger sans passer par la case douane ».