Dario Cologna a décroché son deuxième titre olympique, peut-être plus beau encore que le premier il y a quatre ans, en remportant avec une maîtrise rare le skiathlon sur 30 km à Sotchi. Cette victoire survient trois mois exactement après sa déchirure des ligaments, une blessure qui nécessite normalement de longs mois de convalescence.
Cologna a fini couché dans la neige, une image rare chez lui. Le signe de la violence de son effort, lui qui a dû s'arracher pour déborder dans l'ultime montée le très tenace et véloce Suédois Marcus Hellner. Face à ce redoutable finisseur, le Grison savait qu'il devait prendre quelques mètres d'avance avant le sprint final. C'est exactement ce qu'il est parvenu à faire, entrant dans l'ultime ligne droite avec juste la petite longueur d'avance qui lui a permis de résister au retour du Suédois, 2e à 4 dixièmes. Le Norvégien Martin Johnsrud Sundby a pris la médaille de bronze, à 1''4.
Une nouvelle fois, Cologna a fait parler son intelligence tactique. Une marque de fabrique chez lui. Alors que Sundby et Hellner ont mené plus souvent qu'à leur tour sur ce parcours fait de 15 km en classique puis 15 km en skating, Cologna s'est le plus souvent maintenu aux alentours de la 10e position, guettant l'occasion. Toujours vigilant, rarement enfermé. Il a mis le nez à la fenêtre une première fois vers le 23e km, prenant brièvement la tête avant de légèrement rentrer dans le rang.
A chaque montée - et il y en avait beaucoup sur ce parcours exigeant et tourmenté -, les observateurs ont senti qu'il disposait d'un gros "moteur". Il a surgi à point nommé, avec son style puissant et fluide, puis a parfaitement négocié le dernier virage piégeux grâce à sa technique impeccable, avant d'aller cueillir cet or qui brille de mille feux.
Il faut savoir que Cologna n'avait pu disputer que deux courses de Coupe du monde cet hiver! Après sa blessure ligamentaire à une cheville, survenue lors d'un footing le 11 novembre, il n'a repris l'entraînement de fond que le 19 décembre. En deux mois, il s'est hissé sur le sommet de l'Olympe pour la deuxième fois, après son triomphe de Vancouver sur 15 km en 2010. A ces deux sacres olympiques s'ajoute son titre mondial de février dernier à Val di Fiemme, sur le skiathlon 30 km également. Et bien sûr ses trois globes de cristal du général de la Coupe du monde et ses trois victoires au Tour de ski...
En larmes
Le champion du Val Müstair a fondu en larmes sur le podium. Il revient de si loin, lui qui reconnaissait il y a trois semaines à peine, après les Championnats de Suisse à Leysin, qu'il risquerait d'être "un peu juste" pour les Jeux, du moins pour les premières courses. Il comptait monter en puissance au fil de la quinzaine. S'il y parvient, on n'ose imaginer quelle sera sa collection de médailles... Le Grison a prévu de disputer six courses à Sotchi (skiathlon, sprint, sprint par équipes, 15 km, relais et 50 km), un programme étoffé comme jamais. Il abattra encore des atouts considérables sur le 50 km et sur 15 km, pour le moins.
En attendant, ce skiathlon convenait parfaitement à sa polyvalence. Le Grison avait du reste remporté la "répétition générale" dans cette épreuve sur ce même parcours olympique, il y a douze mois. A 27 ans, il continue à progresser, du moins mentalement. Il y a quelques années, Cologna étincelait en Coupe du monde et au Tour de ski mais sans pouvoir être une figure une marquante aux Mondiaux ni aux JO, nonobstant son sacre de Vancouver. Aujourd'hui, et depuis les Mondiaux 2013 à Val di Fiemme, il est présent à tout moment, sur tous les fronts.
"Ce titre, je n'en avais même pas rêvé", a déclaré Cologna au micro de la télévision.
Les Russes et le Norvégien Petter Northug sont les grands perdants de la journée. Alexander Legkov a cassé un bâton dans l'ultime ascension, Maxim Vylegzhanin a été battu dans sprint pour le bronze et Northug n'a jamais été vraiment dans le coup. Un signe encore pour la suite?