Le parquet de Paris a ouvert une information judiciaire contre X pour "blanchiment de fraude fiscale", visant le ministre français du Budget Jérôme Cahuzac. Cette mesure a été décidée en raison de la nécessité d'enquêter en Suisse mais également à Singapour, a-t-il précisé mardi dans un communiqué. Le portefeuille ministériel de Jérôme Cahuzac a été confié à Bernard Cazeneuve.
Le ministère public genevois a de son côté confirmé avoir reçu une demande d'entraide judiciaire en ce sens. Elle sera traitée par le procureur Yves Bertossa, a indiqué mardi à l'ats Vincent Derouand, responsable de la communication du pouvoir judiciaire genevois, sans donner cependant davantage d'informations.
Une simple enquête préliminaire de police ouverte en janvier dernier visait jusque-là à déterminer si Jérôme Cahuzac a ou non détenu un compte en Suisse afin de dissimuler des revenus au fisc.
Le ministre du Budget a nié catégoriquement avoir détenu un tel compte, y compris devant l'Assemblée nationale; de nombreux responsables politiques et élus, y compris de l'opposition, l'ont alors soutenu.
Le parquet de Paris a jugé que seule la nomination d'un juge d'instruction permettrait d'effectuer des vérifications approfondies, notamment en Suisse et à Singapour.
Investigations complexes
"Les investigations menées dans le cadre de l'enquête préliminaire doivent désormais se poursuivre dans un cadre procédural plus approprié au regard de la complexité des investigations à diligenter, notamment la mise en oeuvre complète de l'entraide répressive internationale, en Suisse, mais aussi à Singapour", détaille le parquet dans son communiqué.
Par ailleurs, l'analyse par les enquêteurs d'un enregistrement dans lequel un homme présenté comme Jérôme Cahuzac évoquait lui-même en 2000 un compte en Suisse a conforté dans un rapport remis lundi l'hypothèse selon laquelle il s'agissait bien du ministre.
La police technique et scientifique a comparé la voix avec celle de M. Cahuzac et estimé que "le résultat de notre analyse renforce l'hypothèse que Jérôme Cahuzac est le locuteur inconnu", selon le parquet.
Sur l'enregistrement diffusé par Mediapart, un homme dit à un interlocuteur non identifié: "Ca me fait chier d'avoir un compte ouvert là-bas, l'UBS c'est quand même pas forcément la plus planquée des banques".
"Aucune altération ou modification"
Confirmant les informations diffusées ce week-end par le site d'informations français Mediapart, le parquet de Paris précise que l'enregistrement n'a subi "aucune altération ou modification." Il souligne par ailleurs que la récente réponse de l'administration fiscale suisse à la demande d'entraide de son homologue française ne permet pas à la justice d'innocenter Jérôme Cahuzac, car il s'agit "d'un simple renseignement."
Le gouvernement français s'est refusé dans l'immédiat à commenter les nouveaux rebondissements dans cette affaire. Le site Mediapart a estimé pour sa part que ses informations, à l'origine de cette affaire, étaient entièrement validées.
L'affaire Cahuzac est précisément partie de la diffusion, en décembre dernier, par Mediapart de la bande sonore dans laquelle un homme supposé être Jérôme Cahuzac évoquait en 2000 un compte suisse à la banque UBS. Selon le site d'information, qui, outre l'enregistrement, s'appuyait sur plusieurs sources, le ministre aurait fermé ce compte en 2010 pour le transférer à Singapour.