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Littérature: le Grand prix du roman de l’Académie française décerné à Binet

Laurent Binet reçoit le Grand prix du roman de l’Académie française grâce à son livre «Civilizations» dans lequel il réécrit l’histoire en revenant sur l'époque des Conquistadors.

31 oct. 2019, 19:28
Son livre de 384 pages est érudit et drôle.

L’Académie française a ouvert jeudi la saison des prix littéraires en décernant son Grand prix du roman à Laurent Binet pour «Civilizations». L’écrivain français est récompensé pour une uchronie imaginant la conquête de l’Europe par les Incas au XVIe siècle.

Agé de 47 ans, l’auteur français de «HHhH» (Goncourt du premier roman en 2010) et de «La septième fonction du langage» (prix du roman Fnac et prix Interralié en 2015) a été choisi au 4e tour par 10 voix contre 8 pour Bruno de Cessole («L’île du dernier homme», Albin Michel), a annoncé Hélène Carrère d’Encausse, secrétaire perpétuel de l’Académie française. Le prix est doté de 10’000 euros (11’000 francs).

Sans attendre la proclamation officielle, les éditions Grasset avaient annoncé le nom du lauréat sur leur compte twitter, un geste jugé «peu élégant» par un académicien. Laurent Binet, 47 ans, était en lice face à Bruno de Cessole et Brigitte Giraud («Jour de courage», Flammarion) qui est toujours en lice pour le prix Médicis décerné le 8 novembre.

 

 

«Je suis très heureux pour mon livre», a réagi l’écrivain. «C’est toujours une chance d’avoir un prix, une opportunité pour accroître la visibilité d’un livre». Homme de gauche, Laurent Binet s’est dit «flatté» de recevoir ce prix de la part de l’Académie française souvent présentée comme un temple du conservatisme. Depuis sa sortie en août, son troisième roman s’est écoulé à 20’000 exemplaires selon l’institut Gfk cité par le magazine professionnel Livres Hebdo.

La possibilité d’un autre monde

Vers l’an mille, la fille d’Erik le Rouge quitte le Groenland pour faire cap vers le Sud. Dans ses soutes, il y a des chevaux, des forgerons connaissant le secret du fer et des hommes porteurs de quelques maladies qui aideront (après avoir manqué de décimer les autochtones) à fabriquer des anticorps bien utiles quelques siècles plus tard.

En 1492, quand Christophe Collomb débarquera (sans le savoir) en Amérique la donne ne sera plus la même. Capturé par les Indiens (armés de flèches aux pointes de fer et résistants aux maladies des Blancs), le navigateur ne retournera jamais en Espagne. En 1531, fuyant l’armée de son frère Huascar, le chef inca Atahualpa prend l’océan en route vers l’Europe.

Rien n’est vrai bien sûr mais tout est réaliste. C’est la grande force de ce roman d’histoire parallèle où l’on croise Charles Quint, François Ier, Erasme, Luther ou Montaigne. Dans son «Histoire du monde au XVIe siècle» (Fayard, 2009), l’historien Patrick Boucheron racontait déjà comment d’autres mondialisations auraient pu être possibles.

 

 

Laurent Binet reprend cette thèse avec brio. Son livre (384 pages, 22 euros) est érudit (trop parfois) et drôle (souvent). L’écrivain à l’éternel air d’adolescent («Civilizations» est évidemment une référence au jeu vidéo «Civilization»!) multiplie les clins d’oeil. La laine des lamas remplace celle des moutons sur le Vieux Continent, une pyramide (aztèque) est dressée dans la cour du Louvre.

Le livre refermé on se pose la question de savoir si l’Europe et le monde seraient différents aujourd’hui si l’histoire racontée par l’écrivain avait été celle-ci. «J’ai laissé une fin assez ouverte», reconnaît Laurent Binet qui ajoute avec malice: «libre à n’importe qui de prendre la suite».

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