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Russie: contestation couverte par la TV publique

Après un quasi black-out depuis le début de la contestation en Russie, les chaînes de télévision contrôlées par l'Etat ont couvert, contre toute attente, l'énorme mobilisation de samedi.

12 déc. 2011, 07:20
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Samedi soir, une des chaînes les plus regardées, Pervyi Kanal, a ouvert son journal avec un sujet sur la manifestation qui a rassemblé des dizaines de milliers de personnes à Moscou. La chaîne a insisté sur le fait que les autorités l'avaient autorisée. Des images des rassemblements dans diverses villes de Russie ont aussi été montrées.

Peu avant, la chaîne NTV, contrôlée par le géant de l'énergie Gazprom aux mains de l'Etat russe, avait aussi diffusé un sujet sur la mobilisation, faisant état de "dizaines de milliers" de manifestants qui "ne veulent pas de révolution, mais des élections justes, qui sont le meilleur remède contre les révolutions".

"C'est un évènement important. Cela repousse les frontières", a déclaré l'analyste spécialisée dans les médias, Anna Katchkaeva.

Le silence absolu

Les jours précédents, la télévision publique avait quasiment passé sous silence les manifestations et les interpellations de centaines de manifestants. Parmi eux, le célèbre blogueur anti-corruption Alexeï Navalny, qui a été condamné à 15 jours de prison.

"J'étais étonnée car au début certaines chaînes ont montré quelques courtes images (...), puis mardi, c'était le silence absolu", a indiqué Irina Petrovskaïa, experte des médias pour la radio Echo de Moscou.

Mais samedi, à Moscou, quelque 50'000 personnes - jusqu'à 80'000 selon certaines estimations, et 25'000 selon la police - ont manifesté. Une mobilisation sans précédent, suivie un peu partout dans le pays.

Selon les experts, du fait de l'ampleur de la mobilisation, de son suivi intense sur Internet, via les blogs et les réseaux sociaux, il était devenu impossible de ne pas couvrir l'évènement.

Ordre présidentiel

Une source au Kremlin, citée par le principal site russe d'informations en ligne gazeta.ru, a précisé que le président Dmitri Medvedev avait lui-même donné l'ordre aux chaînes télévisées de couvrir la mobilisation.

Samedi, elles ont commencé à diffuser des sujets sur l'évènement vers 16h00 heures locales, soit environ deux heures après le début du rassemblement, "lorsqu'il est devenu évident que tout se passait tranquillement", a précisé Mme Katchkaeva.

Pervyi Kanal, qui existe depuis l'époque soviétique, a même montré des images d'opposants tels que l'ex-vice-Premier ministre Boris Nemtsov, qui n'était pas apparu depuis des années sur les chaînes publiques. "Il y a une semaine, il aurait été impossible d'imaginer que Nemtsov passe sur Pervyi Kanal", souligne Mme Katchkaeva.

Pas d'illusions

Peu après la diffusion de son sujet, la chaîne NTV postait même sur son compte Twitter: "Est-ce qu'il y a encore des critiques contre NTV après ce qui a été diffusé à 19h00?".

Pourtant, les experts ne voient pas dans ce mouvement inattendu des chaînes contrôlées par l'Etat un véritable tournant pour la télévision. "La télévision est toujours la dernière à changer", explique Mme Katchkaeva.

"Il n'y a pas de quoi se faire des illusions. Cela a été fait dans une situation concrète lorsque 100'000 personnes sont sorties dans la rue et l'image parlait d'elle-même", a renchéri Arina Borodina, critique des médias pour le quotidien "Kommersant". "La situation à la télévision ne va pas changer dans son ensemble", conclut-elle.

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