2022 restera marquée par l’envol des prix de l’énergie, lequel a conduit au grand retour de l’inflation dans de nombreux pays. Portés essentiellement par l’invasion de l’Ukraine par les troupes russes en février, pétrole, gaz et électricité se sont négociés à des niveaux inédits depuis plusieurs années avant de se replier, en particulier pour l’or noir, sur fond de craintes d’une récession mondiale.

Actuellement, les contrats à terme sur le baril de Brent de la mer du Nord et celui de West Texas Intermediate (WTI) américain se négocient en dessous des 80 dollars. En repli depuis novembre, les deux principales références du marché de l’or noir s’affichent cependant toujours en hausse en comparaison annuelle, soit de 10% et 8%, respectivement.

Représentant pas moins de 40% de l’énergie consommée en Suisse, les produits pétroliers avaient vu leurs prix s’effondrer dans le contexte de la pandémie de coronavirus, la demande ayant chuté à la suite des mesures de confinement et des restrictions de voyage. Le baril de WTI américain est même passé le 20 avril 2020 en zone négative pour la première fois de l’histoire, les investisseurs étant alors prêts à payer pour se délester de leurs contrats.

Avec l’abandon progressif des restrictions liées à la pandémie dans la plupart des pays occidentaux et la reprise de l’économie, les prix de l’or noir ont progressé et retrouvé à l’entame de cette année les niveaux affichés fin 2014, soit autour des 75 dollars pour le baril de WTI et de 82 dollars pour les 159 litres de Brent. Mais alors que pointent de premières poussées inflationnistes, les cours vont bondir à la mesure de la concentration de troupes russes aux frontières de l’Ukraine et du déclenchement, le 24 février, de la guerre.

Niveaux inédits depuis 2014

Début mars, ils grimpent à des niveaux jamais vus depuis 2014 pour évoluer de manière latérale durant le printemps autour des 120 dollars le baril pour les deux références, alors que le conflit en Ukraine semble parti pour durer et que l’Union européenne adopte dans la douleur un embargo pétrolier contre Moscou, ses 27 pays membres s’engageant à réduire de près de 90% leurs importations d’or noir russe avant la fin de l’année.

Moteur de l’inflation, la guerre déclenchée par le président russe Vladimir Poutine a aussi entraîné l’envolée des prix d’autres matières premières, à commencer par le gaz, la Russie représentant un des plus importants producteurs avec les Etats-Unis, l’Iran, la Chine ainsi que le Qatar, et un fournisseur essentiel pour plusieurs pays européens.

Repli de 42%

Déjà en verve avant le conflit en Ukraine, les prix des contrats à terme du TTF néerlandais, référence du gaz naturel en Europe, ont également décollé, franchissant plusieurs seuils pour se hisser à un pic historique de 345 euros le mégawattheure (MWh) le 24 février.

Les interruptions d’approvisionnement du gazoduc Nord Stream 1 reliant la Russie à l’Europe, des explosions intervenues sur Nord Stream 1 et 2 en septembre et des réductions des livraisons de Gazprom vont maintenir la pression jusqu’en août avant un repli durant l’été et l’automne face aux craintes de récession, alors que les principales banques centrales œuvrent à juguler l’inflation.

Actuellement, le TTF se négocie autour des 104 euros le KWh, un niveau en repli de 42% sur un an. Bien loin des sommets atteints durant le printemps et l’été, le niveau reste nettement supérieur aux quelque 19 euros le KWh affichés au début 2021, année qui a déjà été marquée par une vive hausse, le TTF l’ayant achevée à près de 70 euros le KWh.

L’envol des prix du gaz, qui affecte tant les particuliers que l’industrie et le commerce, n’est pas non plus resté sans effet sur les tarifs de gros de l’électricité. Si les centrales à gaz doivent tourner pour couvrir les besoins en électricité, les tarifs de l’électricité augmentent en fonction de ceux du gaz acheté par les fournisseurs de courant. De plus, seize réacteurs sur les 56 que compte le parc nucléaire français se trouvent encore à l’arrêt pour des maintenances programmées, certaines s’étant prolongées en raison de problèmes de corrosion.

Face aux craintes de récession, la plupart des observateurs anticipent une demande d’or noir modérée au premier semestre 2023. Alors que l’offre demeure proche du pic atteint fin 2018, les économistes de Pictet estiment qu’elle ne devrait guère augmenter. Il est probable que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et ses alliés de l’Opep+ procèdent à de nouvelles réductions pour s’aligner sur le ralentissement de la demande et stabiliser les prix, lesquels devraient atteindre environ 115 dollars fin 2023.

L’évolution dépendra cependant du rythme de la réouverture de la Chine, note Pictet. Les faibles niveaux d’immunité et de vaccination de la population chinoise, ainsi qu’une capacité limitée des hôpitaux, pourraient retarder le rebond de la demande chinoise de pétrole, observe pour sa part Bank of America. Les prix pourraient rebondir au-dessus des 90 dollars le baril, à la faveur de l’embellie conjoncturelle en Europe et aux Etats-Unis.

Valéry Jeanbourquin/AWP

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