D’abord une lourde neige, en janvier. Puis une violente tempête mi-juillet: plus de 30% des quelque 62 000 arbres de la ville de Zurich ont subi des dégâts en 2021. Il a fallu en couper 2100, soit 3,5%, selon un bilan présenté jeudi. En raison notamment de la densification du bâti et du changement climatique, le renouvellement du patrimoine arboré n’est pas toujours aisé, comme le confirment d’autres villes.

«Ce que les Zurichois ont vécu avec leurs arbres est dramatique», commente Eddy Macuglia, responsable du parc des arbres de la ville de Neuchâtel. «Le 31 décembre 2008, nous avions dû couper près de 5% de nos arbres en raison de la neige, nous savons ce que c’est…»

Certains, chez nous, en ont eu les larmes aux yeux.

Axel Fischer, responsable du parc des arbres de la ville de Zurich

Son homologue à Zurich, Axel Fischer, ne l’a pas caché: «Certains, chez nous, en ont eu les larmes aux yeux.» Les deux événements de 2021 ont été plus graves, pour les arbres, que la tempête Lothar de fin 1999.

Base légale pour protéger les arbres

Zurich a annoncé vouloir planter plus de 2000 nouveaux arbres jusqu’en 2025. «Actuellement, la couverture de couronnes feuillues est de 17%, souligne Axel Fischer. Nous visons une part de 25%, comme l’a déjà Genève.» Problème: contrairement à Fribourg, Neuchâtel, Genève ou Bâle par exemple, la ville n’a pas de base légale permettant de protéger ses arbres. Une loi avait été acceptée en votation en 1992, mais le canton a fait recours au Tribunal fédéral, qui lui a donné raison. Une nouvelle tentative est en cours.

Les déblaiements dus aux catastrophes naturelles de l’année sont aussi l’occasion de renforcer les «fosses racinaires» des arbres, a précisé jeudi Christine Bräm, directrice de la division qui s’occupe de toutes les surfaces vertes de la ville. Par souci de transparence, la liste de tous les remplacements d’arbres est publiée une fois par année, pour la 2e fois en 2021. Il est possible de s’y opposer. «Même si les arbres sont un sujet très émotionnel et si les gens se plaignent dès qu’ils voient les bûcherons, nous n’avons pas eu de recours l’an dernier, note Axel Fischer. La transparence et les explications portent leurs fruits.»

Ilots de fraîcheur

Reste que l’importance des arbres ne cesse de grandir dans les villes, en tant que garants de la biodiversité et comme îlots de fraîcheur surtout. «Il fait en moyenne 3 à 4 degrés de moins sous un feuillage qu’en plein soleil, explique Stéphane Wicht, jardinier de ville à Fribourg.

Mais les arbres, dont la durée de vie est déjà considérablement plus courte en milieu urbain que dans la nature, souffrent eux-mêmes du changement climatique. «Nos hêtres sont sous pression», note Axel Fischer à Zurich.

Nous étudions la possibilité de planter des essences d’arbres d’origine des Balkans, indigènes en Europe, capables de résister au chaud et au froid.

Stéphane Wicht, jardinier de ville à Fribourg.

C’est pourquoi, dans de nombreuses villes, de nouvelles espèces sont en train d’être testées. «Nous étudions la possibilité de planter des essences d’arbres d’origine des Balkans, indigènes en Europe, capables de résister au chaud et au froid», confirme Stéphane Wicht.

Idem à Neuchâtel: «Nous menons des essais notamment avec de nouvelles essences de chênes», révèle Eddy Macuglia. Mais, précise-t-il, le choix d’espèces supportant mieux la chaleur peut se révéler à double tranchant: «Certains de ces arbres supportent mieux la sécheresse parce qu’ils transpirent moins et produisent donc moins d’évaporation. Une pinède n’est pas forcément plus fraîche… Nous essayons donc de maintenir aussi des plantes transpirantes.»

Nous menons des essais notamment avec de nouvelles essences de chênes.

Eddy Macuglia, responsable du parc des arbres de la ville de Neuchâtel

Toutes les villes disent vouloir planter davantage d’arbres ces prochaines années. «Mais l’espace public est le lieu de nombreuses convoitises, de la part d’une population croissante», tempère Richard Wolff (Liste alternative), le municipal en charge des travaux publics à Zurich. Pour Eddy Macuglia de Neuchâtel, le grand problème, c’est le sol: «Avec la densification du bâti, ce sont souvent des arbres dans la fleur de l’âge qui sont coupés, et remplacés par des plus jeunes. Mais planter tous azimuts des jeunes arbres sans analyser leurs chances de survie à moyen et long termes n’est pas forcément très écologique.»

Trois fois plus à Sion

Pour Stéphane Wicht, «planter un arbre est souvent le fruit d’un compromis». Il faut laisser de la place au sol, les fosses de plantation sont importantes pour le système racinaire de l’arbre. Mais la densification du bâti se fait parfois au détriment d’arbres.

Sion a, de son côté, un ambitieux programme d’aménagements urbains pour faire face au réchauffement. L’extension du patrimoine arboré en fait partie, indique la ville: «Nous avons comme objectif de remplacer chaque arbre de grande envergure abattu par trois jeunes arbres replantés. Chaque nouvelle essence est choisie de manière stratégique en tenant compte des défis environnementaux que rencontre la végétalisation en milieu urbain.»

Dans toutes ces villes, les prochains mois, avec ou sans neige lourde, sont attendus avec une certaine anxiété.

Climat: la Confédération aura son système de détection des sécheresses

La Suisse doit combler une lacune importante face à la sécheresse. C’est l’avis du Conseil fédéral qui a décidé mercredi de la mise sur pied d’un système de détection.