Les avalanches de ces derniers jours ont fait une sixième victime cet hiver: dimanche, un randonneur à ski pris dans une coulée la veille dans le Val Müstair (GR) a succombé à ses blessures. Samedi dans cette région, le danger était marqué (degré 3 sur 5). Ce même jour, un autre randonneur perdait la vie en Valais, lui aussi emporté par une avalanche. Vendredi, c’était un snowboardeur en hors-piste qui décédait sous une coulée près de Davos. Et la veille, la neige faisait une autre victime à Scuol (GR). Depuis le début de l’hiver, ce sont ainsi 80 avalanches qui ont déjà impliqué des personnes en Suisse. Et ces derniers jours ont été particulièrement meurtriers.

«Comparé aux autres années, ce chiffre de six morts est en deçà de la moyenne qui tourne autour de 10 à 12 (ndlr: à cette date)», précise Benjamin Zweifel, expert en avalanches à l’Institut pour l’étude de la neige et des avalanches à Davos. «Cependant, l’évolution de ces derniers jours laisse craindre un «effet de rattrapage», malheureusement.»

Manteau neigeux instable

Pourquoi autant d’avalanches en si peu de temps? «Cet hiver, les chutes de neige ont été abondantes en début de saison. Une longue période sèche a suivi, ce qui a entamé la cohésion du manteau neigeux», explique le spécialiste. Les chutes de neige abondantes de la semaine dernière – un mètre en deux jours en certains endroits – ont contribué à rendre le tout très instable. Conséquence: les coulées se sont multipliées.

Ces cinq dernières années, nous avons relevé davantage de coulées. Il est cependant encore tôt pour parler de tendance à long terme.

Benjamin Zweifel, expert en avalanches

Tirer un parallèle avec le réchauffement climatique serait cependant hâtif, met en garde Benjamin Zweifel, même si le phénomène accroît les épisodes de précipitations intenses sur de courtes périodes en hiver. De fortes chutes de neige, suivies parfois de pluie, favorisent ainsi des avalanches. «Ces cinq dernières années, nous avons relevé davantage de coulées. Il est cependant encore tôt pour parler de tendance à long terme», note l’expert.

Ce que l’on observe sur le terrain: l’augmentation du nombre d’avalanches de reptation, à savoir des coulées très humides qui se produisent au niveau du sol directement et non sur des plaques de glace ou de neige. Le gros problème: il est pratiquement impossible de les déclencher artificiellement, souligne Benjamin Zweifel.

Avalanches inattendues

Autre défi: prévoir les zones à avalanche. Cela n’est pas toujours aisé. Ainsi, jeudi, deux personnes ont été blessées lorsqu’une coulée a atteint une piste de ski de fond dans la vallée de Conches (VS). Très impressionnant également, mais heureusement sans aucune victime: le déraillement d’une rame du train Bex-Villars-Bretaye mercredi dernier à la suite d’une avalanche qui a traversé la voie de chemin de fer, sur le domaine skiable de la station vaudoise. «Une enquête est en cours afin de déterminer pourquoi une coulée s’est déclenchée dans ce secteur, alors qu’il n’y en a jamais eu à cet endroit de mémoire d’homme», indique Christelle Piguet, responsable de la communication au sein des Transports publics du Chablais (qui exploitent cette ligne). Pour Benjamin Zweifel, les coulées de neige qui ont fait dérailler le train Bex-Villars-Bretaye et enseveli des fondeurs dans la vallée de Conches se sont certes déclenchées à des endroits inhabituels. «Mais il faut savoir que dans certains lieux, des avalanches ne se produisent que tous les 50 à 100 ans, si bien que l’on oublie qu’il s’agit de zones à risque. Il est donc toujours possible que des coulées se déclenchent là où l’on ne les attend pas», explique l’expert.

Skier sur les pistes balisées ne représente pas de danger en termes d’avalanches.

Benjamin Zweifel, expert en avalanches

En revanche, la probabilité d’être enseveli sur des domaines skiables est minime. «Skier sur les pistes balisées ne représente pas de danger en termes d’avalanches, car ces dernières y sont très rares. On a davantage de risque d’être blessé lors de chutes ou de collisions», estime Benjamin Zweifel.

Les risques du hors-pistes

En dehors des pistes balisées, le risque est par contre bien réel, en fonction des conditions d’enneigement et de la météo. Une bonne formation est vivement recommandée (voir ci-dessous). Benjamin Zweifel se garde bien cependant d’établir un pronostic macabre pour les prochaines années. Selon lui, si l’on observe la situation sur une longue période, on constate plutôt une certaine stabilité en termes du nombre de victimes d’avalanches.

Quant aux travaux de remise en service de la voie du chemin de fer Bex-Villars-Bretaye, ils avancent. Il a fallu d’abord déblayer la zone touchée (trois mètres de neige). Deux grues y seront acheminées aujourd’hui. La rame accidentée devrait être dégagée demain, avant la remise en état de la ligne de contact et des installations. «L’objectif est de reprendre l’exploitation le samedi 12 février selon un horaire légèrement réduit, tenant compte de la rame manquante», informe Christelle Piguet.

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