L'ONU et la France ont réclamé jeudi des "sanctions exemplaires" après le lynchage en public à Bangui par des soldats centrafricains d'un homme accusé d'être un ancien rebelle. L'incident n'a donné lieu dans l'immédiat à aucune arrestation.
"Les incidents qui ont eu lieu hier lors de la cérémonie de remobilisation des FACA (Forces armées centrafricaines) sont des incidents révélateurs et inadmissibles", a déclaré le représentant spécial de l'ONU en Centrafrique, Babacar Gaye, lors d'une conférence de presse à Bangui.
Ils "doivent faire l'objet d'enquêtes et de sanctions exemplaires", dans un pays où toutes les administrations, y compris la justice, sont paralysées depuis des semaines, a-t-il déclaré.
Dans la foulée, Paris a condamné des "actes odieux" et demandé des "sanctions exemplaires" tout en soutenant "la décision de la présidente centrafricaine de transition Catherine Samba Panza d'ordonner une enquête, afin que les auteurs des violences soient identifiés et répondent de leurs actes devant la justice".
Pour Florent Geel, de la Fédération internationale des Droits de l'homme (FIDH), "la mise en place d'une cellule spéciale d'enquête et d'instruction chargée de ces crimes doit être une priorité du nouveau gouvernement pour tracer une ligne rouge et que les crimes ne restent pas impunis".
Sous l'oeil de la presse et des soldats
Mercredi, devant des dizaines de témoins, des militaires ont lynché à mort un homme suspecté d'être un soldat rallié à l'ancienne rébellion Séléka, à l'issue d'une cérémonie officielle où la présidente Catherine Samba Panza avait célébré la renaissance d'une armée nationale.
Plusieurs dizaines de militaires centrafricains ont participé directement au lynchage, sourire aux lèvres et enthousiastes, sous l'oeil de la presse internationale. Aucun soldat ne s'est interposé.
Interrogé sur l'inaction de la force africaine Misca, présente sur les lieux au moment du drame, le général Gaye a affirmé que si "le chapitre 7 autorise à aller jusqu'à un maximum de choses, ça ne signifie pas que face à chaque situation, il faille en arriver immédiatement à la confrontation par les armes. La force létale doit être utilisée avec retenue".
Ces derniers jours, plusieurs organisations non gouvernementales, notamment Amnesty International et Human Rights Watch, ont dénoncé la passivité des forces internationales face aux violences dont sont particulièrement victimes les musulmans à Bangui. Ceux-ci sont assimilés aux anciens rebelles qui avaient multiplié les exactions pendant des mois contre les populations chrétiennes.
Mission française "vraisemblablement" prolongée
Face à la persistance des violences, le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian a estimé que l'ONU pourrait "vraisemblablement" prolonger le mandat des forces françaises de l'opération Sangaris, forte de 1600 soldats, au-delà de la période initiale de six mois.