Prévu tout juste une semaine après la décision du Conseil fédéral de voler au secours d’Axpo, le débat sur le plan de sauvetage des géants de l’électricité promettait de faire des étincelles ce mardi au Conseil national. On a eu droit même à un véritable feu d’artifice durant près de cinq heures, avec des partis se rejetant mutuellement la responsabilité de la crise énergétique.

A l’UDC, on pointe la stratégie énergétique 2050 et, en particulier, le choix de renoncer à de nouvelles centrales nucléaires. Pour la gauche, la faute revient à la libéralisation du marché de l’électricité qui a bloqué les investissements dans le domaine du renouvelable.

Seule l’UDC s’y oppose

Au final toutefois, seule l’UDC et quelques libéraux-radicaux se sont opposés à ce plan de sauvetage, approuvé par 137 voix à 51. Le parlement n’avait guère le choix: «Refuser ce projet serait extrêmement dangereux, pas seulement pour les grandes entreprises de la branche, mais aussi pour notre approvisionnement électrique», a plaidé Delphine Klopfenstein-Broggini (Verts/GE), au nom de la commission. La crainte, c’est qu’une faillite d’un des géants de l’électricité en Suisse n’entraîne une réaction en chaîne, avec pour corollaire des black-out.

L’UDC pense que ce n’est pas ça qui empêchera une pénurie: «On permettra tout au plus à ces entreprises de maintenir leur modèle commercial qui ne fonctionne pas», estime Mike Egger (SG).

Par rapport à la version adoptée par le Conseil des Etats en juin, le plan a été durci sur plusieurs points sensibles, avec notamment une interdiction de distribuer des bonus aux dirigeants des entreprises ayant sollicité la manne fédérale.

Prêt pas encore actionné

Dans le cas d’Axpo, le plus grand acteur du marché de l’électricité en Suisse, le Conseil fédéral a agi par le biais d’une ordonnance de nécessité, se basant sur le projet qu’il a soumis au parlement. Une fois que les deux Chambres se seront mises d’accord sur un texte, la nouvelle loi sera appelée à remplacer ce régime, en principe dès le 1er octobre.

Le co-rapporteur de commission Martin Bäumle (PVL/ZH) ce mardi 13 septembre à Berne.

A noter que si la Confédération a débloqué un crédit de 4 milliards de francs pour Axpo, celle-ci n’a pas encore actionné ce prêt et n’a donc pas encore touché le moindre centime, comme l’a rappelé à plusieurs reprises la ministre Simonetta Sommaruga.

Ce besoin énorme en liquidités est lié à une particularité du marché de l’électricité. A la Bourse européenne de Leipzig, en Allemagne, les producteurs doivent fournir des garanties dont les sommes s’envolent en même temps que les prix de l’électricité. Mais à terme, ils devraient être les grands de cette flambée des prix.

Réserve de dix milliards

A l’instar d’autres pays comme l’Allemagne, l’Autriche, la Suède ou la Finlande, la Confédération a mis au point un plan de sauvetage, sous la forme d’une réserve de 10 milliards de francs, pour éviter la faillite, faute de liquidités, aux producteurs jugés d’importance systémique. Il y en a trois en Suisse: Axpo, Alpiq et BKW.

L’idée est de rendre ces prêts aussi peu attractifs que possible pour qu’ils restent une solution de dernier recours. Ainsi, chacun des trois acteurs va devoir payer un forfait de l’ordre de 20 millions de francs par an pour les frais liés à la mise à disposition rapide de ces 10 milliards. Ils devront en outre s’acquitter d’intérêts sur l’argent emprunté, ainsi que d’une prime de risque, de l’ordre de 4% à 10%. L’opération pourrait donc se révéler très profitable pour la Confédération au final.

Par ailleurs, l’entreprise aidée est soumise à une interdiction de distribuer des dividendes à ses actionnaires. Le Conseil national ajouté hier une interdiction de distribuer des bonus à ses dirigeants. A signaler là qu’Axpo a déjà annoncé qu’elle y renonçait volontairement. La Chambre du peuple a encore renforcé les conditions en matière de transparence pour les entreprises aidées.

En revanche, le National n’a pas voulu (par 125 voix à 69) d’une proposition de gauche visant à contraindre ces entreprises à réinvestir ensuite les bénéfices supérieurs à la moyenne qu’elles réaliseraient dans le développement des énergies renouvelables en Suisse.

Redevances épargnées

Enfin, à la suite du Conseil des Etats, le National n’a pas voulu toucher aux redevances hydrauliques perçues par les cantons et communes, alors que le Conseil fédéral suggérait un sursis pour les entreprises qui réclament un sauvetage.

La Chambre des cantons se penchera à nouveau sur le projet jeudi. Et les deux chambres auront droit à de nouvelles joutes verbales sur le cas Axpo dans deux semaines, l’UDC ayant réclamé et obtenu qu’une session extraordinaire y soit consacrée.

La Liberté

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