Le chauffeur a travaillé pour Rasier Operations B.V., une filiale d’Uber, entre avril 2015 et décembre 2016. Il s’agissait de son activité principale, puisqu’il travaillait environ 50,2 heures par semaine, a expliqué dimanche Me Rémy Wyler, avocat du chauffeur, confirmant une information parue dans la presse helvétique ce week-end.
Fin 2016, son compte de chauffeur a été désactivé en raison de plaintes à son égard. La Cour a estimé que ce licenciement avec effet immédiat n’était pas justifié – l’intéressé n’a pas eu connaissance des reproches et n’a pas pu y répondre – et a condamné la filiale à lui verser les deux mois de salaire du congé légal, ainsi qu’un préjudice moral et les vacances auxquelles il aurait eu droit, soit près de 18 000 francs en tout.
Uber a, selon «Le Matin Dimanche», réagi en déclarant que «depuis des décennies, les chauffeurs sont des travailleurs indépendants en Suisse, et que ceux qui utilisent l’application Uber ne sont absolument pas contraints de travailler avec Uber, qu’ils sont absolument libres de choisir si, quand et où ils veulent recourir à notre application». Et Uber de regretter que la justice vaudoise n’ait pas tenu compte de cet élément de fait dans son arrêt.
Un salarié
Pour Me Wyler, le plus important dans cette affaire est que le tribunal a établi que les chauffeurs Uber, vu leur organisation du travail, ne sont pas des indépendants, mais bel et bien des salariés. «Le jugement est clair. Il reconnaît l’existence d’un contrat de travail», a-t-il expliqué à Keystone-ATS.
«Cela implique», poursuit-il, «que les chauffeurs concernés doivent bénéficier d’une protection en matière de droit du travail et d’assurances sociales». L’impact pour Uber serait important, car cela l’obligerait à payer les cotisations sociales, les congés maladie et maternité, ainsi que l’assurance accident.
Recours attendus
Selon Me Wyler, ce jugement pourrait concerner de nombreux chauffeurs Uber dans tout le pays. «A mon avis, ce jugement est une première en Suisse», a-t-il ajouté. Mais il s’attend à un recours devant le Tribunal cantonal vaudois, puis auprès du Tribunal fédéral. Le délai de recours est de 30 jours.
Pour l’avocat, le jugement devrait concerner aussi bien les chauffeurs UberPop, une offre qui a disparu en Suisse, que les chauffeurs au bénéfice d’un permis professionnel UberX. Les applications et l’organisation du travail sont très semblables, explique-t-il.
Parcours du combattant
Me Wyler est «très heureux» du résultat obtenu devant la justice vaudoise, qui a le mérite de clarifier la situation. Il se réjouit notamment d’avoir réussi à saisir un tribunal suisse, ce qui a relevé du «parcours du combattant», Uber voulant faire examiner l’affaire devant une instance néerlandaise.
Il précise: «On ne se bat pas contre Uber ou contre les applications numériques. Mais ces nouvelles formes d’organisation du travail doivent faire l’objet d’une protection sociale», a-t-il ajouté.