Greffe des deux poumons, covid, 42 jours de coma, champignon mortel. En 2020 et 2021, Joseph Gorgoni a frôlé la mort à plusieurs reprises. De cette expérience, il en a tiré un nouveau spectacle «TransPlanté» qui sera joué au théâtre de Beausobre à Morges, puis au théâtre de Terre Sainte à Coppet.

Comment vous est venue l’idée de rire de vos soucis de santé de ces dernières années et d’en faire un spectacle?

Cela m’est venu quand j’étais à l’hôpital, après ma transplantation. Je m’étais dit qu’il fallait que je raconte ce qui m’était arrivé. Et puis, j’ai eu plein d’autres soucis: le covid, le coma… A partir du moment où j’ai commencé à m’en sortir, je me suis dit qu’il fallait que je raconte ça à ma manière qui est de faire des spectacles et de faire rire les gens.

A l’hôpital, je ne pouvais pas écrire parce que je n’avais pas la force de tenir un ordinateur ou un stylo. Dès que j’ai commencé à aller mieux, j’ai posé tout ça sur le papier. J’ai essayé de voir, d’exprimer les sentiments que j’ai eus quand j’étais à l’hôpital et d’en rire. Simplement.

Comment faites-vous pour faire rire sur un sujet si difficile?

Je ne sais pas. Il y a des gens qui écrivent des livres, qui font des films, des reportages. Moi, c’est l’humour. Quand j’ai su que je pouvais aller mieux, j’ai tout de suite essayé de voir cette situation de manière un peu détachée.

Je n’avais pas envie de faire un spectacle de témoignage pour glacer les gens. C’est une manière d’exorciser la chose. Mais c’est vrai qu’il y a une dimension très émotionnelle dans ce spectacle, qu’il n’y a pas dans les précédents.

Le rire m’a toujours sauvé de tout.

Joseph Gorgoni, humoriste

Est-ce que l’on peut rire de tout?

J’en suis absolument persuadé. Le rire m’a toujours sauvé de tout. Cela dépend de la manière dont on le fait et avec qui. C’est toujours la même chose. Mais je crois qu’effectivement, le rire est salvateur pour beaucoup de choses.

Avec Marie-Thérèse Porchet, vous jouez un personnage. Dans «TransPlanté», vous êtes vous-même. Une manière de faire tomber le masque…

Je l’avais déjà fait il y a une dizaine d’années pour fêter les vingt ans de Marie-Thérèse. J’avais fait un spectacle, «De A à Zouc», où je racontais comment fonctionnait Marie-Thérèse. Cela avait déjà très bien marché. Avec «TransPlanté», j’essaie d’être le plus vrai possible, le plus moi-même. C’est ça, la vraie différence. Avec Marie-Thérèse, on écrit gags sur gags. Avec «TransPlanté», tout est vrai.

Photo: Nathan Hausermann

Vous avez écrit tous les spectacles de Marie-Thérèse Porchet avec Pierre Naftule. Cette fois-ci, c’est la première fois que vous réalisez l’exercice seul…

Oui, c’est la première fois depuis trente ans. Quand je suis sorti de l’hôpital, j’allais voir régulièrement Pierre et l’on avait parlé de l’idée de ce spectacle. On avait déjà réalisé ensemble une structure. Mais c’est vrai que le texte, je l’ai écrit moi. Et du coup, oui, c’est très différent. J’avais très peur avant la première de ne pas être à la hauteur.

Cette nouvelle expérience vous a-t-elle plu?

Beaucoup, oui. Je me suis fait aider par Sébastien Corthésy et Pascal Bernheim. Mais comme c’est un spectacle très personnel, personne d’autre que moi ne pouvait l’écrire. Je tenais absolument à ce que tout ce que je raconte soit vrai. Je suis content de me dire que je peux aussi y arriver sans Pierre. Heureusement d’ailleurs, parce qu’il n’est plus là aujourd’hui.

Votre tournée a commencé le 9 mars. Comment le spectacle a-t-il été reçu par le public?

C’est vraiment hallucinant. Il y a une affection, un engouement. On a rajouté trois dates supplémentaires à Genève. Les gens sont très contents. Ça les a beaucoup touchés. Le public est debout tous les soirs.

Etre sur scène, c’est presque une protection.

Joseph Gorgoni, humoriste

Sur scène vous parlez de vous-même. Vous protégez-vous d’une quelconque manière?

À partir du moment où l’on se met sur une scène, un peu comme je le fais en ce moment, forcément, on se met en danger, parce que c’est très intime. Mais pour moi, être sur scène, c’est presque une protection. Raconter ce qui m’est arrivé me fait un bien fou et j’ai l’impression que ça fait du bien aux gens aussi.

Photo: Nathan Hausermann

Depuis votre sortie de l’hôpital, qu’est-ce qui a pris de la valeur dans votre vie?

Comme je le dis souvent, ça change tout et ça ne change rien. J’ai toujours vécu un peu au jour le jour. J’essaye de me rendre compte de la chance que l’on a d’être en Suisse, de vivre dans un pays où on est libre de pouvoir être comme on veut.

Mais franchement, je ne crois pas que j’étais différent avant. A présent, je suis un patient au quotidien. Chaque fois que je vais à l’hôpital et que je fais des prises de sang je me rappelle que j’ai vraiment beaucoup de chance.

Quand retrouvera-t-on Marie-Thérèse Porchet?

Figurez-vous que ce sont les 30 ans de Marie-Thérèse en 2023. En fin d’année, on va faire un nouveau spectacle. On commence à écrire maintenant, d’ailleurs. Avoir des projets, ça aide à avancer aussi. Après, vous dire ce qui va se passer, je ne sais pas exactement. Mais en tout cas, Marie-Thérèse n’est pas morte. Elle est là. Et ça m’amuse toujours.

Infos pratiques

«TransPlanté», 28 mars au théâtre de Beausobre, complet, possibilité de s’inscrire sur une liste d’attente. 29, 30 et 31 mars au théâtre de Terre Sainte, dernières places disponibles sur www.theatre-de-terre-sainte.ch

Joseph Gorgoni: «Tout ce que je raconte est vrai»

Avec son nouveau spectacle «TransPlanté», l’humoriste Joseph Gorgoni est de passage dans les théâtres de la région. Rencontre.