Dans sa jeunesse, Jacques Necker (1732-1804) avait été un brillant banquier genevois. Ses talents lui avaient assuré la fortune. Nommé ministre de la République de Genève à Paris en 1768, ses écrits politiques et économiques seront remarqués à Versailles. L’histoire retiendra qu’il fut à trois reprises ministre des finances de Louis XVI.

La première fois qu’il endossa ce costume, ce fut en 1776. Sa politique économique faite de rigueur, de réformes, prônant la transparence et la réduction des dépenses, s’était opposée aux milieux conservateurs qui péroraient au château de Versailles et avaient l’écoute du roi. Il démissionnera en mai 1781.

A contrario, par son pragmatisme et son sens de l’équité, le Genevois avait su s’attirer les faveurs du peuple français. Pour l’économiste, l’intervention de l’Etat au niveau social, face à un libéralisme qui plongeait les Français dans la pauvreté, était indispensable.

Ami de Louis-François Guiguer

Banni de la cour du roi, Necker s’installera sur les rives du Léman de 1781 à 1788. C’est durant cette période qu’il acheta, en 1784, le château de Coppet.

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A trois reprises, Jacques Necker fut à la tête des finances de la France. (Crédit: Musée national Suisse)

Avant de poser ses bagages dans sa nouvelle demeure, Necker avait entrepris d’importants travaux de rénovation. Pendant quelques mois, il avait dû louer à Lausanne une aile du château de Beaulieu, qui accueille aujourd’hui le musée de l’Art Brut.

C’est là que sa chère épouse Suzanne (née Curchod et originaire de Crassier) décédera en 1784. Cette femme brillante, qui encouragea son mari dans son ascension sociale, avait tenu un salon littéraire très apprécié à Paris. C’est elle qui est à l’origine de l’hôpital parisien Necker.

Pour Jacques Necker, ce retour sur les rives du lac est l’occasion d’étoffer son carnet d’adresses. Dans celui-ci figure le nom de son ami Louis-François Guiguer de Prangins (1741-1786).

Cet ancien officier des Gardes Suisses s’était installé dans le château familial en mars 1771. Homme éclairé, le baron avait lu et apprécié les nombreuses publications politiques de Necker.

Lui-même n’hésitait pas à prendre la plume. Il se distinguera d’ailleurs en rédigeant pendant quinze ans un journal décrivant la vie quotidienne, sociale et économique de la région.

De son renvoi à la prise de la Bastille

Dans ses notes, il est mentionné, par exemple, la visite à Prangins de Jacques Necker, accompagné de son épouse Suzanne et de sa fille, le 27 septembre 1783. La fille du grand argentier n’est autre que la future Mme de Staël. Louis-François Guiguer qualifie Germaine (1766-1817), alors adolescente, de «naturelle, vive et gaie».

Mais revenons à Jacques Necker. En 1788, il est de retour à Paris et prend une nouvelle fois la tête des finances de la France. Au regard des tensions sociales, de la grave crise économique qui secoue son royaume, Louis XVI l’a rappelé… puis congédié le 11 juillet 1789.

Le ministre est une nouvelle fois désavoué. La noblesse et le clergé sont vent debout contre ses propositions pour soutenir les petites gens qui renflouent la dette du pays par leurs impôts.

Grave erreur, lourde de conséquence. Parce que le Genevois était très populaire, ce renvoi sera l’une des sources de mécontentement du peuple de Paris. La fronde entraînera la prise de la prison de la Bastille le 14 juillet, les prémices de la révolution française.

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Un habit présenté au Château de Prangins qu’aurait porté Jacques Necker. (Crédit: Musée national Suisse)

Face à l’insurrection qui menace le pays, Louis XVI va une nouvelle fois solliciter l’aide de Necker. Le 16 juillet 1789, l’ancien banquier retrouve ses prérogatives. Pour une courte durée puisqu’il démissionnera le 4 septembre 1790.

Jacques Necker terminera ses jours dans son domaine de Coppet où il décédera à l’âge de 71 ans. Il est inhumé dans les jardins du château, aux côtés de son épouse et de sa fille.

Quand Necker venait en voisin au château de Prangins

Dernier portrait de la nouvelle galerie du château de Prangins: Jacques Necker. Depuis son domaine de Coppet, celui qui fut ministre de Louis XVI, rendait visite à son ami Louis-François Guiguer.