La step régionale unique a déjà les deux pieds dans la tombe. Jeudi dernier, la direction de l’Association d’épuration des eaux usées de La Côte (APEC) a annoncé son intention d’abandonner le projet d’une station d’épuration unique à Gland. Cette décision devra être validée par le Conseil intercommunal de l’APEC au tout début de l’année 2021.

Cette imposante infrastructure devait coûter quelque 98 millions de francs et être prête pour 2025. Elle aurait permis de traiter les eaux de 120 000 équivalents-habitants des communes de l’APEC, de celles de l’Association pour l’épuration des eaux usées du Boiron (AEB) mais aussi de Nyon, Prangins, Chéserex et Gingins. Soit, au total, 30 localités.

«La position du comité de direction n’est pas un choix. Elle est la conséquence des conditions émises par les autorités nyonnaises», ont indiqué les dirigeants de l’APEC dans une lettre à l’intention des délégués des communes membres.

Nyon et sa condition sine qua non

La décision de Nyon: c’est là le cœur de cette prise de position. Il y a quelques semaines, la commune validait sa participation au projet… mais y mettait une condition: le crédit d’investissement de 7 millions ne serait versé qu’une fois l’affectation du terrain glandois du Lavasson, prévu pour la step, définitivement validée. Cet amendement émis par des conseillers communaux avait été adopté à l’unanimité. Par ailleurs, la Municipalité promettait d’étudier en parallèle un plan B: la mise aux normes de l’actuelle step nyonnaise de l’Asse.

«Ils ont dit ‘‘oui, mais non’’, estime Yves Reymond, président du comité de direction de l’APEC, confirmant une information de «24 heures». Michael Rohrer, municipal à Gland, abonde: «Ces amendements de Nyon, c’est une forme de coup politique. C’est comme une peau de banane, c’était refuser sans le dire.»

«On ne peut plus se permettre d’attendre que Nyon veuille bien participer pleinement au projet», affirme encore le municipal. La step de la Dullive, qui couvre les communes de l’APEC, a déjà dépassé sa capacité maximale. Alors que son maximum est de 40 000 équivalents-habitants, elle traite actuellement les eaux usées de 43 000 équivalents-habitants. «Il ne faudrait pas qu’une pièce importante casse, sinon il faudrait déverser dans le lac. Vous comprenez l’urgence!», insiste de son côté le président de l’association intercommunale.

J’ai un peu le sentiment que cet abandon est un soulagement pour beaucoup de gens.

Daniel Rossellat syndic de Nyon

A Nyon, on rappelle l’objectif initial: être le plus efficace, rapide et le moins cher possible. «On nous a laissé entendre que cela pourrait être le cas avec la nouvelle step régionale, mais nous avons aujourd’hui de sérieux doutes. On ne voit pas d’avancée, comment cela se fait-il que le Conseil communal de Gland n’ait encore vu passer aucun préavis à ce sujet, se demande Daniel Rossellat, syndic de Nyon. J’ai un peu le sentiment que cet abandon est un soulagement pour beaucoup de gens.»

Même lieu, mais plus petit

Pour tenter d’aller plus vite, l’APEC se rabat sur l’un des autres projets étudiés initialement, nommé APEC 45. Cette nouvelle station d’épuration des eaux usées desservira les 21 communes de l’association. Sans Nyon donc, qui n’en est pas membre.

Elle prendra place sur le même site du Lavasson, entre Gland et Luins. Au lieu de 35 000 m2 pour la step unique, seuls 28 000 m2 seront nécessaires. Elle coûtera environ 60 à 65 millions, au lieu des 98 millions du projet unique. Cette step plus petite sera également équipée pour traiter les micropolluants. De plus, elle pourra être positionnée en parallèle à l’autoroute. «Cela permettra de laisser davantage d’espace à des aménagements paysagers», explique Michael Rohrer, municipal glandois chargé de l’environnement.

En bleu, le périmètre du site du Lavasson, tel qu’initialement prévu pour la step unique. (Document APEC)

Avec ce projet plus réduit, la direction de l’APEC souhaite aussi diminuer les risques de se retrouver avec de nombreuses oppositions, voire un recours (voir encadré). La Ville de Gland doit, quant à elle, refaire une demande de déclassement des terrains agricoles auprès du canton. «Pour une step pour 120 000 équivalents-habitants, l’examen préalable du canton était favorable. Mais pour 60 000 équivalents-habitants, il faudra argumenter», prévient Thierry Genoud, municipal glandois chargé de l’urbanisme qui estime que ce nouveau projet a de bonnes chances d’être validé.

Un deuxième pôle régional

Plan B aussi pour la Municipalité de Nyon. La ville doit mettre sa station d’épuration aux normes, notamment en ce qui concerne le traitement des micropolluants. «Nous devrions pouvoir déposer une demande de crédit d’études pour le site de l’Asse au tout début 2021», indique la municipale Roxane Faraut Linares.

La ville pourrait, elle aussi, devenir un centre régional pour l’épuration. «Nyon ne va pas travailler seule sur ce projet, assure l’élue. Nous allons rapidement prendre contact avec les partenaires du bassin versant.» Soit l’Association pour l’épuration des eaux usées du Boiron (AEB) ainsi que Prangins, Chéserex et Gingins.

Cette dernière commune devait d’ailleurs encore valider sa participation à la step unique, alors que Prangins et Chéserex avaient déjà dit oui. Les récents événements la laissent dans le flou. «Nous n’allons de toute façon pas rénover notre propre installation. Nous nous raccorderons soit à Nyon, soit à l’APEC, selon ce qui sera le plus pertinent financièrement», indique le municipal ginginois Denis Krebs.

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