Les sauveteurs rollois se sont jetés à l’eau samedi dernier. C’était en piscine couverte, certes, mais les volontaires se sont relayés durant douze heures. Cet effort n’était pas totalement gratuit car chaque traversée avait été sponsorisée. Ce grand bain sportif avait pour but de lancer la collecte de fonds qu’entreprend dès maintenant la section rolloise de la SISL, Société internationale de sauvetage sur le Léman, en vue d’acquérir une nouvelle vedette.

En tout ce sont quelque 400 000 francs qui devront être réunis pour s’offrir l’unité d’intervention désirée, dont le coût total avoisine le demi-million de francs. «Pour nous, il était important de montrer que les membres du Sauvetage se mouillent et qu’ils ne se contentent pas de tendre la main», souligne le président rollois, Numa Grau.

Pas envie d’être les pompiers du lac

Car, comme c’est le cas dans toutes les sections suisses de la SISL, c’est aux sauveteurs eux-mêmes de financer leur fonctionnement et les investissements dans le matériel d’intervention. Contrairement aux pompiers, financés par les communes et par l’Etablissement cantonal d’assurance (ECA), les sauveteurs ne disposent pas de subventionnements récurrents.

«C’est un état d’esprit qui nous est propre, et que, tant que je serai à la présidence, nous ne remettrons pas en question», revendique Michel Detrey, président de la SISL. Si on ne peut pas affirmer que les sections vivent sans argent public, car les communes répondent généralement aux appels aux dons, particulièrement lors d’acquisitions coûteuses, il n’en reste pas moins que le sauvetage sur le lac reste une action de volontaires bénévoles et altruistes.

«Si on introduit un système de paiement automatique, du genre de la carte TCS, on ne pourra plus compter sur le moindre don. Et je ne suis pas sûr qu’on y gagne», poursuit le président central qui rappelle que les statuts des sauveteurs interdisent de facturer les interventions.

Moins de gratitude de plaisanciers dépannés

Il confirme néanmoins les propos de plusieurs trésoriers de sections qui constatent une certaine baisse des rémunérations reçues après un dépannage. «Parfois, on ramène une embarcation au port et le plaisancier se fend d’une vingtaine de francs pour nous remercier sans imaginer que cela couvre à peine nos frais de carburant», explique un caissier d’un sauvetage du Petit lac.

«Auparavant, le lac comptait de vrais navigateurs, conscients de l’importance du sauvetage. Aujourd’hui, on a aussi des gens qui ont vendu la caravane pour s’acheter un appartement sur l’eau et qui se sentent moins engagés avec l’ensemble des acteurs du lac. Et surtout, ils sont sûrs que nous sommes un service public, rémunéré pour nos vigies et nos sorties», renchérit Michel Detrey.

Des fêtes et des lotos pour financer les activités

La réalité est juste inverse puisque les sauveteurs offrent leur temps sans toucher la moindre solde, et qu’en plus ils se fendent d’une cotisation. Pour couvrir leurs frais de fonctionnement, c’est à coups de lotos, de fêtes du lac ou d’appels aux dons diffusés en tous-ménages qu’on tente de remplir les caisses, entre deux sorties sur le lac. «Et pourtant, nous sommes les primo-répondants sur toutes interventions lacustres, relève Numa Grau. Souvent, des riverains qui assistent à un incident sur le Léman nous alertent directement, c’est dire si notre job est connu et apprécié.»

Cette activité de secouriste est surtout en croissance puisque le lac devient un terrain de jeu accessible à toujours davantage de monde, avec notamment l’apparition des paddles. «Et c’est tant mieux, car le Léman, même s’il n’est pas aussi simple à appréhender qu’une bête piscine géante, ne doit pas être réservé à une poignée de privilégiés, affirme le président du sauvetage de Rolle. Ce qui m’inquiète davantage, c’est la perte du réflexe de base qui consiste à porter secours à une personne en danger. L’assistance en milieu hostile est un devoir pour tout navigateur, en mer, mais aussi sur notre lac.»

Infos pratiques

Le sauvetage de Rolle prendra part à la Fête du port (puces nautiques, animations, restauration), le samedi 29 septembre de 10h à 18h, au port.

Pas de luxe, ni de frime
Pour s’offrir l’unité d’intervention désirée, le sauvetage de Rolle devra débourser près de 500 000 francs. La section souhaite se doter d’un bateau semblable à la "Némésis", vedette du Sauvetage de Nyon depuis une dizaine d’années. «Ce sera le jumeau puisqu’il sera construit sur le même moule», confirme Olivier Luthi, constructeur naval à Crans-près-Céligny. Il y a un peu plus de dix ans, les Nyonnais avaient investi quelque 460 000 francs pour leur vedette.
Mais comment justifier pareille facture pour un bateau? «C’est du sur-mesure, construit en Suisse dans des matériaux composites modernes et livré prêt à l’utilisation», explique laconiquement le constructeur naval qui précise qu’il faut déjà compter près de 100 000 francs rien que pour la motorisation. «Il n’y a pas de surenchère sur le matériel entre les diverses sections, dément le président central, Michel Detrey. Mais il faut que les sauveteurs disposent de matériel fiable et durable, particulièrement les Rollois qui veillent sur un très vaste secteur.» Il se défend de toute velléité de luxe ou de frime dans les sections SISL. «D’autant plus qu’ils doivent les financer eux-mêmes.»

Un bateau tout beau tout neuf pour le Sauvetage de Rolle

La société a accueilli, vendredi, sa nouvelle unité d’intervention. Le bateau doit encore être équipé avant d’être opérationnel.