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"La Tuile" et Isabelle Chevalley au tribunal: 30 jours-amendes pour le rédacteur en chef

Le Tribunal de Porrentruy a condamné mercredi le rédacteur en chef du journal satirique jurassien "La Tuile" pour injures à l'encontre de la conseillère nationale Vert'libérale Isabelle Chevalley. La satire ne permet pas tout, a t-il déclaré.

04 sept. 2013, 12:16
La Tuile

La presse satirique ne peut pas tout dire. Le rédacteur en chef de "La Tuile" a été condamné mercredi à 30 jours-amendes à 100 francs assortis d'un sursis de deux ans pour injures contre la conseillère nationale Vert'libérale Isabelle Chevalley.

Pour le juge Pascal Chappuis, "La Tuile" est allée trop loin. Pierre-André Marchand "ne cherchait pas à informer son lectorat, mais à exprimer son mépris envers la plaignante", a-t-il expliqué dans la salle bondée du tribunal de première instance à Porrentruy (JU). Il a souligné le caractère outrageant du texte. S'adressant au prévenu, le juge lui a rappelé que "la liberté d'expression ne l'autorise pas à injurier une femme, même s'il s'agit d'une politicienne".

Outre les jours-amendes, Pierre-André Marchand devra s'acquitter des frais de justice de 1050 francs et d'une partie des frais d'avocats d'Isabelle Chevalley à hauteur de 6000 francs. Cette dernière avait porté plainte pénale contre le patron de "La Tuile" pour diffamation, calomnie et injures.

Quatre publications du brûlot jurassien sont en cause: les numéros de janvier, mars, avril et juin 2012. La feuille satirique n'y est pas allée de main morte. La politicienne vaudoise y a été traitée de tous les noms d'oiseaux, en mode vulgaire et peu élégant.

"Je m'en fiche!"

Sitôt sorti de la salle du tribunal, le rédacteur en chef s'est mis à fanfaronner: "Je m'en fiche complètement de ce jugement!" Affichant une mine satisfaite, il a estimé que la politicienne vaudoise avait été désavouée. Et lui ne fera en tout cas pas recours. Le juge s'est montré clément et juste, a déclaré Christophe Schaffter, qui défendait gratuitement M. Marchand.

Isabelle Chevalley, discrète durant tout le procès, n'a pas commenté le jugement et s'est rapidement éclipsée. Il faut dire qu'elle s'est retrouvée en terrain hostile.

Avant l'ouverture du procès, des manifestants ont accueilli le prévenu et la plaignante avec des pancartes clamant: "Non aux éoliennes", "Non au massacres de nos horizons"ou encore "Pour la liberté d'expression". Ils ont ensuite rejoint un public nombreux et acquis à la cause de "La Tuile", opinant du chef aux affirmations du prévenu et rigolant de ses calambours.

Pour rappel, Isabelle Chevalley a été sous mandat pour les Services industriels de Genève, à l'origine de projets éoliens dans le Jura.

Lors des plaidoiries, Pierre-André Marchand s'est levé et a déclamé son texte sous le regard sévère et pensif du juge. Non, il ne regrette rien. D'ailleurs, la victime, c'est lui, a-t-il dit, jugeant Isabelle Chevalley "la pire prédatrice du Jura".

D'un ton léger, il a rejeté et minimisé les faits qui lui sont reprochés: ses insultes n'étaient que "des plaisanteries culturelles" et "des jeux de mots". Tout de noir vêtu, expansif, il s'est posé en défenseur de l'intégralité territoriale jurassienne et a accusé la conseillère nationale de vouloir "ruiner La Tuile".

Acharnement blessant

Face à lui, et malgré le rose "flashy" de son costume, Isabelle Chevalley, passera presque inaperçue et s'exprimera peu. Tournant obstinément le dos au public, elle a assuré d'une voix faible avoir été "très touchée" par les attaques du feuillet satirique. "C'était très insultant. Je ne comprends pas cet acharnement contre moi", a-t-elle répondu au juge. Jamais encore elle n'avait été ainsi prise à partie.

"Malgré la virulence du débat éolien, rien ne justifie de tels propos", a appuyé son avocat. Le juge lui a donné partiellement raison. Il a cependant rappelé à Mme Chevalley que, en tant que politicienne, elle se doit d'avoir "le cuir épais et savoir accepter la critique la plus virulente". C'est pourquoi ni le tort moral, ni les dommages et intérêts, ni l'impression du jugement dans "La Tuile", réclamés par l'accusation, n'ont été retenus. Les jours-amendes ont été moins élevés que demandés.

Les articles incriminés ont été écrits dans un contexte très agité, prenant le cadre de l'implantation d'éoliennes dans le Jura. Fin 2011, les oppositions se sont multipliées contre des projets de grands groupes énergétiques suisses, dont notamment celui des services industriels genevois. Les SIG ont voulu créer, sans succès, un parc éolien à Delémont et de nouvelles éoliennes à St-Brais.

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